Wings of Steel – Le retour du glam, à l’ancienne
Sortis tout droit d’une faille temporelle ouverte en 1987, les Californiens de Wings of Steel, fondés en 2019 (oui, vous avez bien lu), ont enflammé la scène nancéienne dès les premières secondes. Mélange explosif de heavy metal old school et de glam assumé, leur style évoque sans détour les grandes heures du glam.
Le chanteur, chemise blanche à jabot, pantalon de cuir bien moulant et cheveux longs flottant au vent, incarne à lui seul une époque bénie du rock peroxydé. À ses côtés, un guitariste torse nu, crinière bouclée et bandana vissé sur le crâne, tout droit sorti d’une VHS de 1986. Le batteur, également torse nu, martèle ses fûts avec une énergie primitive.
Pas de décor superflu, si ce n’est le nom du groupe brandi fièrement en fond de scène.
Vanden Plas – Les vétérans sous la pluie
Viennent ensuite les Allemands de Vanden Plas, piliers du metal progressif depuis leur formation en 1986. Une musique plus cérébrale, plus technique. Leur set, sans fioriture scénique, repose avant tout sur l’interprétation et l’expérience.
Un léger souci de son viendra ternir l’entrée en matière : la voix du chanteur, habituellement puissante et lyrique, se fait étouffée, avalée par les éléments techniques… et bientôt par la pluie, qui s’invite à mi-concert comme un invité un peu saoul qu’on n’avait pas convié.
Malgré tout, le public reste fidèle, stoïque, capuche vissée sur la tête, concentré sur la virtuosité de ce groupe qui n’a plus rien à prouver, mais qui continue de jouer avec passion.
Europe – L’averse nostalgique
Les Suédois d’Europe, mythiques depuis leur explosion planétaire en 1986 avec The Final Countdown, n’ont pas besoin de décor extravagant : leur simple nom suffit à électriser la foule. D’entrée, un son plus clair, plus puissant — on monte d’un ton, et ça s’entend.
Dès la deuxième chanson, Rock the Night, l’ambiance s’embrase. Le chanteur, Joey Tempest (qui visiblement a pactisé avec le diable ou un très bon dermatologue), affiche un style toujours aussi classe : veste ajustée et foulard tombant avec nonchalance. Difficile de ne pas cligner des yeux : la ressemblance avec Tom Cruise est si frappante qu’on en vient à douter.
Côté voix, cependant, les années se font entendre : les longues notes emblématiques ne tiennent plus tout à fait. Mais qu’importe, l’énergie est là, le public suit, et même une reprise très étonnante de No Woman No Cry vient s’immiscer dans le set, déclenchant à la fois des frissons et quelques sourires mi-surpris, mi-hilares.
Et puis arrive l’incontournable, le mythique titre du groupe, The Final Countdown, forcément. Et là, c’est l’explosion. La foule saute, crie, chante, sans discontinuer. La voix fatigue, mais l’ambiance, elle, atteint des sommets. Le tout ponctué par un “Putain de merde !” sincère du frontman, suivi d’un “À bientôt !”
Dream Theater – Pluie d’accords techniques
On change de registre avec Dream Theater, titans du metal progressif américain depuis 1985. Le concert s’ouvre sur une vidéo immersive, rétrospective des albums du groupe, présentée comme un voyage à travers le temps à bord d’un vaisseau spatial futuriste. Bienvenue dans la matrice du metal.
Le retour sur scène du légendaire batteur Mike Portnoy, de nouveau aux commandes pour cette tournée des festivals 2025. Le concert démarre fort avec Night Terror, extrait de leur dernier album, puis s’enchaîne avec une précision chirurgicale. C’est la technique qui règne ici : riffs labyrinthiques, solos vertigineux, breaks complexes… une vraie démonstration.
Dream Theater ont ici su condenser leur univers en une setlist parfaitement calibrée pour un format festival. Des titres comme Rite of Passage et As I Am injectent une dynamique bienvenue, plus directe, presque agressive, contrastant intelligemment avec les longues envolées instrumentales.
Durant le titre Peruvian Skies, le groupe offre un moment de grâce inattendu : dans un enchaînement parfaitement fluide, les riffs emblématiques de Wish You Were Here de Pink Floyd s’invitent au cœur du morceau. Quelques notes plus tard, c’est au tour de Wherever I May Roam de Metallica de surgir, subtilement intégré. Un passage aussi surprenant que magistral, qui témoigne du savoir-faire et du goût du détail de Dream Theater, capables de rendre hommage sans jamais briser la cohérence de leur univers sonore.
Entre la virtuosité de Vanden Plas et la démesure de Dream Theater, ce deuxième jour aura définitivement mis la barre très haut côté technique.
Conclusion : pluie d’émotions et tempête de décibels
La pluie s’est finalement éclipsée, laissant place à une foule encore plus dense, plus envoûtée que la veille. Chaque groupe a apporté sa pierre à l’édifice : le glam flamboyant de Wings of Steel, la profondeur introspective de Vanden Plas, l’euphorie nostalgique d’Europe et la maîtrise technique de Dream Theater.
Un jour 2 tout simplement stratosphérique, qui prouve que le metal n’a pas d’âge — tant qu’on a des guitares, des lumières, un peu de pluie, et beaucoup de passion.
[Adeline Pusceddu]