Après une pause productive – qui a abouti à l’album ‘Earthbeat’ – le groupe est prêt à lâcher son son colossal sur les scènes ! Rencontre avec les guitaristes et fondateurs du groupe.

Pouvez-vous brièvement présenter votre passé musical, pour commencer ?
[Philippe, guitare :] J’ai eu plusieurs groupes, mais l’un un peu plus important dans ma carrière, un groupe de death/grind, mais assez éclectique et ouvert, Amok. On a joué entre 2001 et 2007, on a fait passablement de concerts en Europe et pondu un album qui a pas mal marché. Ça nous a ouvert quelques portes et c’est là que j’suis allé en Scandinavie.

[David, guitare :] Je fais de la musique depuis l’âge de 7 ans, quelques groupes de rock et de hard, dont un quatuor, Forge, avec le chanteur de Sybreed, le bassiste de Bodybag et le batteur de Nebra. À l’époque je jouais sur une Ibanez 7 cordes, il y en avait déjà pas beaucoup en ’99/2000, et détunée, on était les premiers de la scène, on se foutait de ma gueule.

[Philippe :] Un peu les précurseurs du djent, en fait ! Nous on a perdu une corde, maintenant.

[David :] Et aujourd’hui quand je vois les 8 ou 9 cordes, ça me fait étrangement sourire… Ensuite j’ai eu une coupure de 6 ou 7 ans, sauf un peu de home studio ou de projets standalone. J’ai fait de la moto, jusqu’à ce que la première passion reprenne le dessus.

Quand vous avez commencé Colossus Fall en 2011, donc ?
[David :] On peut dire que le projet est parti avant. On est sorti sur les planches en 2011, mais ça faisait déjà presque 2 ans qu’on essayait.

[Philippe :] Le temps de trouver des musiciens, c’est pas toujours évident.

[David :] En fait j’voulais refaire un groupe, j’ai croisé Philippe alors que ça faisait longtemps qu’on se voyait pas, il aurait dû jouer dans un groupe qu’on a finalement jamais fait ensemble.

[Philippe :] On s’est croisé à un concert de Gojira à l’Usine, on s’est dit ‘On va le faire, ce groupe !’ et on s’est fixé des objectifs, une direction musicale, un peu hardcore, à la Converge, Mastodon, Gojira, stoner, moins death ou tech.

[David :] Ah, je m’souvenais plus que c’était Gojira ! On a trouvé les gens qui nous manquaient jusqu’à 2011, puis le temps de faire des compos. Il y a eu la première équipe de Colossus, qui a bien duré plus de 2 ans, puis les changements de line-up, qui nous ont posé quelques soucis. Un classique avec les groupes, mais c’est jamais facile. De toute façon le groupe ne s’arrête pas quand quelqu’un part. Le plus difficile pour nous était de trouver un batteur, c’était pas évident de trouver quelqu’un qui tienne la baraque. Heureusement qu’on a trouvé Bastien, de CardiaC, puis Christophe. Idéalement, faudrait pas qu’on perde des gens en route, mais des fois tu ne choisis pas dans la vie, la famille, le travail. Maintenant ça doit faire à peu près 3 ans et demi qu’on est stables, avec le même line-up. C’est un peu une nouvelle équipe, de nouvelles compos, aussi quelque chose de très frais avec cet album. C’est presque comme un certain renouveau, non ?

[Philippe :] Oui, là c’est le groupe un peu mature, comme on l’attendait depuis longtemps. Puis je pense qu’il va rester, là on a une bonne équipe.

[David :] On s’entend bien, une bonne synergie, ça pète, on a un putain d’album qui sort ! Et on s’est donné énormément de peine pour lui.

Les changements de membres expliquent-ils le petit changement de son depuis votre premier album ?
[David :] On veut faire du chemin ensemble donc on a cherché des gens qui veulent rester et investir du temps. On a eu des nouvelles guitares, aussi, et Christophe ajoute plus de double à la batterie et on a composé beaucoup plus collectivement.

[Philippe :] Tous les morceaux du nouvel album ont été composés avec la même équipe, donc y a plus de cohérence. On s’est mis des limites, pour éviter des déviations, avoir une musique plus franche et frontale. C’est beaucoup de feeling, maintenant, surtout pour nous. La musique n’est pas simpliste, mais c’est mieux quand t’es pas obligé de faire des maths sur scène parce que les riffs sont trop perchés, on se réjouit de les jouer. On est assez dynamiques en live, mais avant il fallait beaucoup se concentrer parfois. Et le public capte ça directement.

[David :] On voulait tous moins de fioritures, de nappes, d’ambiances et de trucs tordus… enfin il y en a toujours un peu, sinon ça ne serait pas du Colossus !

Comment s’est passé l’enregistrement de ‘Earthbeat’ à Paris ?
[David :] C’était chouette de se dire qu’on allait bloquer du temps pour boucler ensemble tout ce qu’on avait préparé pendant plus d’un an. On a eu la chance de tomber sur Fred Duquesne (Mass Hysteria) qui est très pris. Il s’est très investi dans la musique et les arrangements.

[Philippe :] Il a une vision globale, très large et variée, de la pop au grind. Il est très professionnel et n’hésite pas à dire que tel riff ne va pas, c’est trop plan-plan, etc.

Combien de temps ça vous a pris ?
[David :] Une semaine de batterie, une semaine de guitares, une semaine de basse et chants, pour neuf morceaux. C’était éprouvant, ça nous faisait des longues journées, mais c’était plein de bonheur.

Finalement, c’est une expérience à refaire ?
[David :] Oui, c’était super plaisant de se sentir guidé. Ça nous a fait du bien.

[Philippe :] Il essayait de nous comprendre, c’était presque comme s’il faisait partie du groupe parfois. Avec son expertise et son oreille externe, il nous proposait des effets ou des variantes, cohérents dans le morceau et notre musique. C’est plus qu’un ingé-son, c’est presque un producteur.

[David :] Des fois il y a des passages pendant les compos, qui sont un peu moyens, que t’as pas le temps de rebosser, alors ça reste… et en studio, directement il les a pointés du doigt et nous a aidé à corriger ces quelques points-clés.

L’artwork est très travaillé, bourré de symbole. Qui l’a réalisé ?
[Philippe :] Y a quelques temps on a fait un hoodie avec Tony Midi, un artiste Indonésien dont on aimait la patte, il est rapide et très connu dans le milieu (Star Wars, Dimmu Borgir…). On lui a donné quelques souhaits et indications, juste. On était partis sur le côté nature, relations humaines, entre nous, avec les autres, avec la planète etc. puis il avait quasi-carte blanche. Le design est riche, un peu comme une BD, il faut le découvrir !

Justement, à quel point les thèmes abordés sont-ils importants pour Colossus Fall ?
[Philippe :] C’est le chanteur qui écrit. On n’a pas de thématique principale, comme Gojira et la nature. On est souvent dans le côté humain, qu’on parle de conflits ou d’amour. D’abord y’a la musique, puis Matt adapte son texte par-dessus, comme un instrument.

[David :] C’est très différent comme manière de faire. Je sais que si j’écris les paroles avant ou en jouant, ça ne sonne pas pareil. Mais on est toujours satisfait avec ses paroles. On arrange un peu, comme pour les instruments de toute façon, le morceau change beaucoup avant d’aboutir. C’est un travail de collaboration.

Comment se déroule typiquement votre travail de composition ?
[Philippe :] Assez clairement, David et moi composons principalement beaucoup de notre côté, puis on le propose à Christophe ou tout le monde et c’est à partir de cette base qu’on travaille ensemble et que la sauce commence à prendre.

[David :] On a toujours fonctionné un peu comme ça, mais avant on n’avait peut-être pas la même cohésion.

[Philippe :] Christophe a vraiment une oreille très musicale, un peu comme Fred. Il voit les choses assez loin… c’est son travail, après tout. Il sait ce qu’il faut retravailler ou ce qui ne va pas. On lui propose une idée, il trouve quelques variantes et ça fait germer de nouvelles idées, ça va très vite. Puis ça a bien fonctionné, on a été assez bons niveau timing.

[Philippe :] On a fait moins de live parce que ça demande de l’énergie, des répètes, pour pouvoir se donner les moyens de se concentrer sur la composition de l’album.

[David :] Dès qu’on a eu une date pour l’enregistrement, ça a imposé une cible bien nette qui nous a poussés.

Quels sont vos meilleurs souvenirs de concerts avec Colossus Fall ?
[David :] L’Irlande était terrible, on était complétement déphasés à l’aéroport à cause des trajets, mais on s’est bien marrés en 4 jours avec Gacys Threads, qui ont splitté un peu après. Dommage, c’était un chouette groupe.

[Philippe :] En République Tchèque avec Attack Vertical on s’est retrouvés dans une cave, bien sombre, un peu satanique, qui sentait le musc, sortie d’un film d’horreur au fond de la campagne tchèque. Mais l’ambiance est super dès que la soirée commence, même si le public ne nous connaît pas ! Cette connexion avec des inconnus, ça fait un déclic mémorable. Ça et la goulash de la femme du gars qui nous a invités. Faut dire qu’on a été bien reçus. On a fait quelques scènes avec des groupes qu’on apprécie, par exemple le Rock Altitude avec Neurosis, ou à l’Undertown avec Agnostic Front.

[David :] Et le Summer Breakdown Festival avec Walls Of Jericho, c’était une super soirée. Ce sont des gars chouettes, ça fait de bonnes rencontres.

[Philippe :] Côtoyer et jouer avec des groupes qui nous inspirent, c’est la cerise sur le gâteau !

Est-ce que des groupes, des lieux ou des festivals feraient un peu les conditions de concerts rêvées pour vous ?
[David :] Comme lieu, y a le Hellfest, forcément.

[Philippe :] En Suisse je pense au Greenfield. Y a quelques groupes, comme Converge, avec qui je me verrais bien tourner. Mais y en a plein. Sinon on parlait de l’Amérique du Sud, y a une bonne scène, par exemple au Brésil.

[David :] Et si on faisait la croisière 70’000 Tons Of Metal, ce serait super !

[Philippe :] Plus abordable, sinon, on pensait soit à Portugal/Espagne, soit à l’Europe de l’Est qu’on a déjà fait un peu et la Scandinavie.

Comment vous sentez-vous dans la communauté metal locale ?
[David :] On a des contacts de longue date, ça ne s’est pas fait rapidement.

[Philippe :] On essaye d’établir des connexions avec la Suisse alémanique. C’est pas évident avec le Röstigraben, mais on espère vraiment. Sans oublier le Tessin et les Grisons !

[David :] Avec notre nouvel album, on veut vraiment tourner en Suisse et pas seulement romande ! Y a déjà des choses prévues, d’autres pas encore annoncées, mais cette année on a un peu les crocs et on est ouverts.

[Philippe :] Y a le vernissage de l’album à l’Écurie de Genève, le 16 février. On travaille avec l’étranger : France, Bénélux et Allemagne. On sait aussi que le live appelle le live, donc il faut déjà des dates pour pouvoir obtenir plus de dates. C’est normal, pour les promoteurs.

[David :] Pour avancer, il faut qu’on soit calés, organisés et méthodiques. On a fait le point et on a bossé à fond en 2018, cette année on revient sur le devant de la scène super-motivés ! On a le feu ! Avoir un label est aussi un gage de confiance. Randy et Tenacity nous aident beaucoup, ils bossent vraiment bien et on leur fait confiance. On reste dans le local et on ne pourrait pas avoir mieux pour le groupe, en tout cas aujourd’hui.

Pour finir, si vous avez une anecdote croustillante, je suis preneur !
[David :] On a joué à Clermont-Ferrand avec Vesperine. On apporte toujours des produits du terroir et un jeune voulait faire le malin avec notre abricotine, qu’il ne connaissait pas…

[Philippe :] Il lui a fallu 5 minutes pour être proche du coma, il ne savait plus comment il s’appelait et ça a fini dans l’ambulance… faites attention !

FICHE CD :
Artiste : Colossus Fall
Album : Earthbeat
Label : Tenacity Music
Note : 4/5

www.colossusfall.com

Auteur : Alain Foulon

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