Troisième opus pour les Anglais d’Idles, qui sortent avec ‘Ultra Mono’ un effort simple, percutant et rempli d’amour. Rencontre avec Mark Bowen, guitariste de la formation.

Beaucoup de groupes annulent leur sortie d’album cette année. Pourquoi avez-vous décidé de sortir Ultra Mono, y a-t-il un sentiment d’urgence ?

Pour nous oui, il y a une certaine urgence. Nous avons sérieusement parlé de quoi faire alors que la pandémie prenait forme et que les concerts et festivals se retrouvaient annulés. Nous nous sommes dit qu’il fallait prioriser ce sur quoi nous avions un contrôle, et c’était important pour nous de sortir cet album et de ne pas s’asseoir dessus et d’attendre des jours meilleurs. C’est une bonne occasion pour que les gens se réjouissent de quelque chose, il n’y a pas trop de quoi se réjouir en ce moment tu sais… Et je me réjouis aussi de sortir enfin (rires). Nous allons sortir plus de singles que d’habitude, pour que justement les gens se réjouissent.

Les paroles sont également extrêmement pertinentes, quand tu vois les mouvements Black Lives Matter ou Extinction Rebellion et que tu entends ‘Do you hear that thunder, that’s the sound of strenght in numbers’ (‘Entends-tu ce grondement ? C’est le bruit de l’union qui fait la force’)
Ce qui nous a marqué c’est à quel point cet album prend tout son sens. Nous ne savions pas que la situation allait prendre cette forme il y a plus d’un an, mais les choses prenaient un tournant étrange. Le mouvement BLM et cette idée de quelque chose qui se met en marche, c’est assez réjouissant. C’est important pour nous car nous parlons de problèmes de société, cet album est une évolution de choses dont nous parlons depuis un moment. Beaucoup de choses qui se passent en ce moment reflètent bien cela.

Vous avez terminé une tournée mondiale et vous êtes rués en studio. Comment ‘Ultra Mono’ a-t-il pris forme ?
C’était après les festivals, je crois qu’on en a fait plus de cinquante. On écrivait depuis ‘Joy’ en fait, mais juste des petits extraits, enregistrés sur la route. On avait ce titre, ‘Ultra Mono’ en tête, et on a passé une majorité du temps à surtout réfléchir à ce que cela signifiait pour nous, en tant que groupe et qu’individus. La majorité a été écrite deux semaines avant d’entrer en studio, et le reste était principalement Joe et moi à chercher à mettre en forme. Joe n’a écrit aucune paroles avant d’enregistrer, c’était assez impressionnant à voir. Il était dans le studio vocal à chanter, et juste faire les prises deux-trois fois. Quand on a un concept, on réfléchit et parle énormément avant de commencer quoi que ce soit. Même des idées basiques, puis on affine jusqu’à ce qu’on sorte un produit terminé. Mais oui, on fait confiance à Joe et c’est probablement son meilleur travail. C’est peut-être un meilleur workflow pour lui! (rires)

Et Ultra Mono, c’est quoi?
L’idée c’est que tu te fasses comprendre en aussi peu de mots, de notes ou de gestes que possible. Comme une prouesse. Tu dois considérer beaucoup de chose, écouter, être ouvert d’esprit, mais également être ferme, confiant, te connaître intimement. Parfois je jouais ma guitare et j’avais juste besoin d’une note, et je me disais ‘c’est ça, ça n’a besoin de rien d’autre’.
Notre musique prenait de l’ampleur également, nous orientons notre musique pour des salles plus grandes. Kings of Leon s’est retrouvé de groupe du coin à des morceaux dignes d’hymnes avec une monstre réverbe. Pour nous, ça ne marchait pas. Alors on a cherché des moments monolithes, puis de laisser de la place, afin de pouvoir jouer avec la réverbération d’une grande salle. On gardait constamment en tête l’idée de concert dans des grosses salles, de comment faire quelque chose de simple mais percutant.

Le dernier morceau ‘Danke’ reflète bien cela.
C’était un titre un peu bizarre. On était en studio le dernier jour, Joe fait de la guitare, je joue avec mes pédales d’effets et on a mis toutes nos idées ensemble, pour faire un espèce de medley sur ce que Ultra Mono est pour nous.

Vous avez produit l’album avec Kenny Beats, un producteur de hip-hop. Qu’est-ce qui vous attirait chez lui ?
Il nous a contacté via Instagram, on lui a fait écouter quelques démos basiques, et il a craqué son slip. C’est un artiste incroyable, tellement enthousiaste et plein d’énergie, je n’ai jamais rencontré quelqu’un comme lui. Je ne peux pas encore t’en parler, mais nous avons fait quelque chose avec lui lorsque nous étions à Los Angeles. Il n’a aucun égo, il cherche à obtenir le meilleur des personnes et des sons. On était en phase de mixage, et Kenny et moi nous sommes donné rendez-vous à Londres et il m’a fait écouter quelques trucs sur lesquels il bossait, et je me suis dit ‘oh mon Dieu c’est exactement ce dont nous avons besoin’. Il a une compréhension des low-end, et une clarté de la musique qui est impressionnante. Il se réjouissait de travailler avec nous car c’est un grand fan de notre musique. Il nous a vraiment aidés à sortir cette clarté hip-hop / electro qui était omniprésente dans les chansons : il a donné quelques touches hip-hop, a musclé la batterie de Jon, a rajouté des low-ends, car on voulait que l’album soit aligné avec le hip-hop contemporain. Si tu écoutes Spotify et écoute Kendric Lamar, Kayne West, Idles, Billie Eilish, on voulait que tout soit homogène et pas que les auditeurs se disent ‘c’est quoi ce machin rétro’ ?

Vous voulez justement attirer les fans de hip-hop ?
Probablement. On a toujours ratissé large, on aime pas se donner d’étiquette, car nous venons de milieux tellement différents avec des influences musicales variées. On voulait que ‘Grounds’ soit un morceau hip-hop mais avec des guitares., genre Kayne West écrit un morceau pour AC/DC. ‘Reigns’ représente bien ce côté electro / techno, mais avec cette patte Idles. Mais on se limite à nos instruments, on ne va pas rajouter d’instrumentation. On a gagné beaucoup en confiance en nous-même, et à notre façon de travailler en studio. On travaille beaucoup mieux et on arrive mieux à assimiler nos idées.


www.idlesband.com

FICHE CD
Nom de l’album : Ultra Mono
Label : Partisan Records / Musikvertrieb
Note : 4.5/5