S’il y avait une soirée qui nous avait mis l’eau à la bouche lors de l’annonce du Montreux Jazz Festival 2025, c’est bien celle du lundi 14 juillet avec la venue des monstres sacrés britanniques que sont Bloc Party (tournée des 20 ans de la sortie de ‘Silent Alarm’, premier album du groupe) et PULP (tournée de l’album ‘More’ sorti en juin dernier sur Rough Trade, premier opus depuis 24 ans), un authentique événement musical.
Formé en 1999 dans la région londonienne, Bloc Party est un groupe que l’on apprécie davantage en live que sur album, sa musique prenant notamment une dimension supérieure lors des échanges avec le public de Kele Okereke (chant, guitare rythmique), l’un des membres fondateurs avec Russell Lissack (guitare).
La tournée « 20 Years of Bloc Party » du quatuor britannique passait par la Scène du Lac du MJF pour le plus grand plaisir des fans. ‘Silent Alarm’ est donc particulièrement mis à l’honneur avec des pépites comme les impétueux ‘Price of the Gasoline’ et ‘Helicopter’ ou le délicat ‘This Modern Love’ qui clôturera le concert.
Une musique aux sonorités rappelant parfois The Clash, The Cure ou parfois même des groupes plus indie comme Radiohead ou Björk. Nos coups de cœur iront au nerveux ‘Traps’ et au sublime ‘Blue’, doux et émouvant, jalons d’une belle heure de souvenirs musicaux.
45 minutes (!) ont été nécessaires pour le changement de scène avant la venue de PULP. Il faut dire que huit musiciens accompagnent Jarvis Cocker (deux guitaristes, deux violonistes, deux batteurs, un claviériste et un bassiste, sans compter deux choristes qui se produiront en fin de concert). L’espace est conçu comme un podium de discothèque, mettant en valeur chaque artiste, podium séparé en deux par un escalier qu’empruntera souvent le leader du groupe pour venir se percher sur les retours du devant ou prendre la pose. A l’arrière, un immense rideau lumineux LED pour la projection d’animations bien senties au gré des chansons.
On le savait déjà, Jarvis Cocker est un artiste singulier, génial, extravagant, hyperactif et généreux. Chemise brune, veste taupe, pantalon de velours beige, grosses lunettes rectangulaires à montures noires, ébouriffé, le chanteur nous rappelle un peu Woody Allen à ses débuts. Dans la gestuelle et l’attitude scénique, c’est plus du côté de Tim Burton qu’il faudrait aller chercher. Jarvis ne cesse de gesticuler en rythme et au son de ses musiciens, arpente la scène, se contorsionne ou prend la pose, poète et troubadour habité, fantasque et génial. ‘More’ se taillera la part du lion avec six titres – un pur bonheur de découvrir ces nouveaux titres en live – dont le planant ‘Slow Jam’, le délicat ‘Farmers Market’ et l’enjoué ‘Got to Have Love’ aux accents disco.
Si le public est bien présent et chaud comme la braise, c’est bien sûr pour les tubes. En première partie de concert, ‘Disco 2000’ fait exploser la Scène du Lac. Les spectateurs des premiers rangs dansent et sautent dans tous les sens comme pour rattraper les 24 ans écoulés depuis la sortie de l’avant-dernier album de PULP. Le classieux ‘This Is Hardcore’ accentue un peu plus la moiteur ambiante et ‘Do You Remember the First Time ?’ en remet une (belle) couche.
La ferveur du public et l’ambiance survoltée ne redescendront pas avec les impeccables ‘Mis-Shapes’, ‘Babies’ et enfin – feu d’artifice digne d’un 14 juillet (un comble pour un éminent sujet de la perfide Albion) – l’incroyable ‘Common People’ repris à l’unisson par tout le public.
Réunis sur le devant de la scène, Jarvis et ses musiciens diront au revoir à leurs fans subjugués, avec le paisible ‘A Sunset’ au terme de l’une des plus belles soirées du Montreux Jazz Festival de ces dernières années, rien que ça.
Texte : Jean-Blaise Betrisey
Photos : Alex Pradervand
