Le 10 octobre 2025, j’ai « vu » un Coup de grâce. J’ai fait un saut dans le temps avec une totale nostalgie. Je me suis retrouvé plus de 30 ans en arrière alors qu’à peine âgé de 16 ans, je découvrais un groupe mythique du Québec, Vilain Pingouin. Ahhh Les belles années. C’était mon premier show rock à vie, avec des chums du secondaire… et j’ai eu la piqûre solide. Je dirais même qu’ils ont inspiré une partie de ma vie.
À cette époque, j’ai été captivé par leurs rythmes bien à eux et par leurs textes. Trente ans plus tard, j’ai compris qu’ils ont gardé leur identité. Du Vilain Pingouin, c’est un style en soi, un amalgame de plusieurs styles catalysés par le rock qui rend leur musique unique. Mais avant tout, Vilain Pingouin, ce sont des textes engagés, profonds et intelligents.
Le message que porte chacune de leurs chansons ne peut vous laisser indifférent. Écoutez Dieppe, Sous la pluie, Le train, Marche seul, Les belles années, Délinquance… bref, écoutez n’importe laquelle de leurs chansons et vous y trouverez un message touchant… parfois bien codé. Si bien codé qu’après 30 ans, c’est en lisant le livre Rudy en 23 tounes que j’ai enfin compris la profondeur de certains textes… oufff. Je vous conseille de l’acheter et de le lire, il fait du bien à l’âme. Car oui, un texte de Vilain Pingouin, c’est une histoire vécue par un parent, un ami, un voisin, une société. Ce sont des mots bien choisis qui, droit au cœur, viennent vous toucher.
Pour écrire des textes comme ça, l’inspiration née de l’empathie doit être au rendez-vous. Tellement de sujets sont abordés qu’on peut ressentir l’ouverture d’esprit du groupe. La guerre, la politique, la famille, la détresse et j’en passe. Au fond, comptez le nombre de chansons qu’a lancées cette bande de pingouins et vous connaîtrez le nombre de sujets qui les ont inspirés.
Bien sûr, les gars ont pris des années, de belles années. De nouveaux pingouins se sont joints à eux et ont reçu leur identité par transfusion. Ils sont restés les mêmes. Malgré les épreuves vécues, comme les AVC du chanteur Rudy Caya, c’est avec la même passion au cœur qu’ils sont restés debout et continuent à nous livrer la marchandise. Dans ce show de leur dernière tournée Coup de grâce, c’est l’authenticité, la simplicité et leur plaisir à jouer avec la foule qui nous connecte, comme une gang de chums qui se retrouvent après longtemps.
Et que dire des musiciens qui ne font qu’un avec leurs instruments et qui ont tout donné. Tout donné au point que Claude Samson, multi-instrumentiste et membre fondateur du groupe, a livré la marchandise avec brio malgré une santé qui n’était pas à son top. Un vrai « the show must go on ». Merci, Claude.
Si j’ai eu la chance, comme plusieurs Sherbrookois, d’avoir assisté à ce show, ce n’est rien comparé à ce que j’ai vécu juste avant. C’est grâce à Sébastien Tacheron, photographe talentueux et passionné pour Daily Rock Québec, que j’ai eu un accès privilégié au groupe. Sébastien, c’est l’artiste derrière les photos du présent article, mais aussi celui qui a pris le cliché et saisi l’âme de Rudy lors de la photo qui fait la couverture de son livre Rudy en 23 tounes. Avec lui, nous avons eu la chance de faire une entrevue avec Rudy avant le show, juste les trois ensemble dans sa loge.
Une entrevue qui a rapidement tourné en grande discussion sur les origines du groupe, la vie et la société, mais aussi sur Rudy Caya, l’humain. Initialement prévue pour un quart d’heure, c’est pendant plus d’une heure et trente minutes que Rudy s’est livré à cœur et bras ouverts, tatoué comme un vieux chum qu’on retrouve et où le temps s’arrête.
J’ai redécouvert Vilain Pingouin, et découvert l’humain. J’ai compris pourquoi les textes me touchent autant. Rudy, c’est un gars qui n’écrit pas pour sortir un album ou pour la gloire. Rudy, il écrit quand il a quelque chose à dire, quand il perçoit d’un œil externe ce qu’une personne vit autour de lui. Il parle d’expériences humaines qui pourraient nous arriver à tous, qui nous concernent tous.
D’ailleurs, il dit que s’il a pu écrire Salut salaud, c’est parce qu’il n’avait jamais vécu lui-même le suicide d’un proche. Drame qu’il a côtoyé plus tard dans la vie, il lance aujourd’hui le message de ne jamais se sentir coupable du choix des autres. « Le suicide est un drame humain où les gens ne veulent pas mourir, mais arrêter d’avoir mal. » Il invite les gens à parler de leurs difficultés avec leurs proches, sans honte, car l’entourage ne peut pas deviner « juste un petit mot futile ».
D’une générosité et d’une empathie hors pair, c’est sa lucidité qui lui a permis d’écrire autant de succès. Et ce n’est pas fini. Bien que ce soit leur dernière tournée, il n’arrêtera pas de composer. Je lui ai demandé comment il réussit à continuer avec autant de passion à faire de la musique. Il m’a répondu avoir perdu deux passions : jouer de la guitare et la randonnée… mais il dit avoir gardé toute sa tête, son empathie et sa curiosité, donc la vie continue. D’un positivisme solide comme le rock, il voit la vie avec résilience et c’est ce qui le garde vivant.
Si je fais le lien avec l’animal totem, « le pingouin est un symbole puissant de résilience, de communauté, de loyauté et d’équilibre. Il inspire à naviguer dans la vie avec adaptabilité, à valoriser les relations et à embrasser le changement avec détermination et patience. » On est là… version 2.0 (clin d’œil à Rudy si tu lis l’article).
Je pourrais continuer à écrire longtemps, mais je vais me limiter ici, tout comme j’ai moi-même mis fin à l’entrevue alors que toute la volée s’est jointe à nous, car le show approchait. Rudy, lui, continuait à se livrer comme un train qu’on ne peut arrêter. Oui, Rudy est d’une générosité astronomique, empathique et à l’écoute. Il ne compte pas son temps, tout comme un pingouin et sa bande qui prennent soin de leur famille.
Et parlant de prendre soin de la famille, on ne peut passer sous silence le côté paternel du Pingouin, de Vilain Pingouin.
Pour ouvrir la soirée, ils ont fait place en toute confiance à la relève locale. Non, ce ne sont pas des pingouins ni des oiseaux, mais ce jeune groupe sherbrookois, Quédam, peut être fier de son envol. Ils ont allumé la soirée avec leur musique qui inspire aussi plusieurs ressentis. J’ai perçu des notes qui s’envolent tout azimut, passant de Scorpions à Harmonium, effleurant même des touches de Pink Floyd.
Moi-même sherbrookois d’origine, je suis fier de notre relève. Merci Rudy de m’avoir fait découvrir, encore une fois et trente ans plus tard, un groupe qui sort des rangs pour avoir une identité à eux.
Santé aux pingouins et à leur progéniture !
























































