Steve Vai, le musicien hors-pair est de retour avec un nouvel album qu’il veut pur. Pour preuve, son titre d’album  »Inviolate », qui invoque la littérature ésotérique, la pureté et l’innocence. Nous en avons profité pour découvrir un peu plus sur ce musicien qui sa bientôt souffler ses soixante-deux bougies.

Après toutes ces années, tu es enfin de retour avec  »Inviolate » !
Steve Vai : Cela fait un bail que j’ai sorti  »Modern Primitive », mais je ne me suis pas reposé sur mes lauriers. Je tourne pas mal, dans le monde entier. Ensuite, j’ai fait de la musique de film, qu’on va enregistrer en Hollande en mai. Le nouvel album est censé être une trilogie. Mais un jour je me suis réveillé… Et nous étions en confinement. J’ai donc commencé une série de live stream, une plateforme de levée de fonds, j’ai mixé et masterisé un album que j’avais enregistré en une semaine dans les années 90, de la musique de biker que j’avais mis de côté. J’ai aussi fait un album solo acoustique que je n’ai pas pu finaliser.

 »Candle Power » est le premier single sorti en lockdown, avec une nouvelle technique à la guitare. J’ai aussi dû me faire opérer l’épaule, ce qui n’est pas génial ! Je ne pouvais pas jouer avec la main gauche, donc j’ai enregistré tout avec une main pour un morceau qui s’appelle  »Knappsack », qui veut dire  »attelle » en anglais. J’ai enregistré cet album pendant le lockdown. Il y a une nouvelle chanson  »Teeth Of The Hydra », avec une guitare unique qui m’a mis un moment à assimiler !

Et pourquoi ce titre ?
Steve Vai : C’est une référence à la littérature spirituelle. J’aimais ce mot, et la signification veut dire  »impossible de blesser », intouchable, en sécurité. Dans la littérature spirituelle, cela représente l’esprit, la vie de l’individu, la partie qui est invisible et qui nous sommes vraiment. Pas notre corps, notre passé, nos pensées, qui nous sommes vraiment. C’est un super nom pour un album!

Tu t’es inspiré de la littérature spirituelle ?
Steve Vai : Cet album est différent dans le sens que la plupart de mes albums sont très  »produits », très lourds à écouter, des albums avec des guitares servies sur un plateau d’argent. Ici, il n’y a rien de tout ça, ce ne sont que des chansons qui me parlent, que j’aime et qui m’inspirent. Pour moi, la musique a toujours été mon inspiration. Mais si c’est uniquement ce qui t’inspire, alors tu n’es pas créatif. J’ai 61 ans, donc la qualité de ma musique a changé, tout change au travers de ta vie et de ton processus créatif. Tu es toujours  »plus », tu ne peux pas être  »moins ».  »Inviolate » est le mieux que je puisse faire, dans ce sens.

J’ai plusieurs inspirations : celles que je reçois pour les processus créatifs, que ce soit cuisiner, danser, écrire, nous apprécions les choses et celles-ci évoluent. Ceci est servi pas l’univers qui t’offre cela sous forme d’idée créative qui t’enthousiasme. Dès lors, il faut que tu trouves quelque chose pour t’inviter à créer au travers ces offrandes de l’univers. Beaucoup de gens les bloquent. Tu es la seule personne qui bloque toutes ces inspirations que l’univers t’offre. Quand tu te dis  »je ne peux pas le faire, je vais échouer, je ne suis pas à ma place… » l’esprit qui a peur obstrue tes idées créatives. Il y a ces idées qui te viennent, qui te réjouissent, dont tu sais intimement que tu peux le faire. C’est ça l’inspiration  »Inviolate », c’est ce que je recherche.

La deuxième source d’inspiration, c’est l’imagination. Si tu veux être un virtuose de la guitare mais que tu ne sais pas écouter un morceau, il te faut beaucoup d’imagination. Si tu n’as pas le talent ou que tu ne vas pas travailler pour arriver à ce que tu veux, alors tu vas blâmer les autres, tu vas blâmer le monde. Tu ne peux pas être heureux sans savoir ce que tu veux et ce que tu peux vraiment faire. Il faut te trouver comment arriver à être heureux maintenant, car c’est tout cela qui importe.


Le bonheur est donc en toi ?
Steve Vai : Le succès, c’est de trouver la paix en toi. Certes, c’est facile à dire pour moi, tu peux dire que j’ai déjà tout ça. Mais j’ai vécu beaucoup de choses, donc je comprends les choses différemment. J’ai vu plein de musiciens à la recherche du succès mondial pour être heureux, et lorsqu’ils l’atteignent, ils se rendent compte que ce n’est pas ce qu’ils voulaient. Alors ils compensent avec la drogue, l’alcool, une balle dans la tête. Ils s’attendent à quelque chose qui n’est pas véritablement ce qu’ils veulent. Je ne cherche pas le succès.

Pour moi le succès c’est d’aimer le processus de la créativité, de se sentir bien dans l’instant présent. Ce sentiment, il n’y a que toi qui l’as, tu es le seul qui puisses le sentir. Sois gentil avec toi-même, avec ton instrument, avec les gens qui t’entourent, avec l’industrie, c’est cela le secret d’une vie remplie.

J’aimerais te parler de guitares, ce qui te rend heureux. Combien de guitares as-tu utilisé sur cet album ?
Steve Vai : Je ne sais pas. Pour le premier morceau  »Teeth Of The Hydra », quelqu’un a construit une guitare pour moi. Pour d’autres morceaux, je me suis dit que j’aimerais une sept cordes, notamment Bruno, ma célèbre guitare aux cordes brûlées. Parfois, j’ai envie d’une guitare jolie, comme la Gretch avec son son brillant et unique. Mais pour certains riffs, j’ai utilisé ma guitare de jam pour quelques riffs.

Ne regarde pas mes clips, je suis un magicien et je n’utilise pas toujours les guitares pour mes clips afin de ne pas montrer mes secrets ! (rires)  »Apollo & Color » a beaucoup de cordes. Mais la guitare qui fait tout a été faite pour moi par un mec en Slovaquie qui s’appelle Bruno Urban. J’étais chez un de mes amis en Slovaquie, et je jouais sur sa guitare, qui avait un son incroyable ! Je lui ai demandé qui en était le luthier, et j’ai donc contacté Bruno.

Je collectionne beaucoup d’instruments à cordes, j’ai tout ça chez moi ! Un jour, je me suis dit  »je vais mettre tous ces instruments sur un morceau », et c’est comme ça qu’est né  »Apollo & Color ». Ce titre a une partie très rapide, où j’ai utilisé ma Strat pour son son particulier.

Pour  »Avalancha » j’ai utilisé Evil, ma guitare à six cordes avec laquelle je « jamme » beaucoup. J’utilise aussi ma Black Onyx II, que je prendrai sûrement en tournée d’ailleurs. Comme je t’ai dit, difficile de garder un compte du nombre d’instruments que j’ai utilisé !

… Mais laquelle est ta préférée ?
Steve Vai : Evo. Je ne l’utilise pas beaucoup, ce n’est pas la guitare la plus facile, mais j’ai ce sentiment de sécurité. Et puis il y a Flow III, qui est ma guitare préférée depuis de nombreuses années. Elle a vu plus de notes que n’importe quelle autre guitare. Et puis la petite nouvelle, ma Black Onyx III, qui m’offre un univers sonore nouveau vraiment réjouissant. Ta question est très difficile !

Quel fut ton premier contact avec une guitare ?
Steve Vai : Je devais avoir 7-8 ans, et j’ai vu une enfant qui jouait de la guitare. Mon cœur a fait un bond : c’était le son le plus beau que j’aie jamais entendu ! Le son, la communication avec le corps, cela m’a laissé une marque indélébile, je me souviendrai toujours de ce moment. Mais je ne pensais pas que je pourrais jouer de la guitare un jour. C’était trop beau pour moi. J’étais juste en amour avec cet instrument.

Vers 11 ou 12 ans, j’ai découvert Led Zeppelin et Jimmy Page jouer le solo de  »Heartbreaker ». J’ai donc commencé à jouer de la guitare, mais en secret. Je ne voulais pas être cool ! (rires) Mon ami Richard m’a vendu sa Tesco Del Rey pour 5$. Je vénérais cette guitare, à tel point que je dormais avec et l’emmenais même aux toilettes avec moi ! C’était la représentation d’une expression créative. Ensuite j’ai commencé à prendre des cours avec un mec qui s’appelle Joe Satriani, qui habitait dans la même ville que moi… J’ai pris des cours avec lui pendant 4-5 ans !

Vous avez tourné ensemble, vous avez plein de guitaristes qui viennent vous rejoindre pour des concerts… Quel est le guitariste qui t’as le plus impressionné ?
Steve Vai : Je n’en sais rien. J’ai des guitaristes préférés, certains qui me parlent beaucoup. Allan Hollsworth, pour moi, c’était le meilleur, d’après mes goûts. Sa musique n’était pas diluée par qui que ce soit d’autre. Son son était très plaisant à l’oreille. Il y en a tellement ! Jimmy Page, Jimi Hendrix, Brian May, Richie Blackmore… ou encore le jazz, John Benson, Wes Montgomery, ce sont tous des musiciens vitaux à mon évolution, comme Carlos Santana ou Jeff Beck. Mais chaque guitariste que je découvre a un effet sur moi, aussi subtil soit-il.

Quel conseil donnerait-tu à un guitariste débutant ?
Steve Vai : Tu n’as pas besoin de faire des choses que tu n’as pas envie de faire. Tu n’as pas besoin de discipline. Il te suffit de te lancer corps et âme dans ce que tu aimes, sans avoir besoin de qui que ce soit. Trouve ton inspiration.

Site: Steve Vai // Concert : 6 juillet 2022 – Komplex 457 – Zurich