Alors que les choses soient claires : on a dormi à peu près cinq heures à nous tous réunis depuis notre arrivée, on a tellement chaud que nos habits ont littéralement fusionné avec notre peau et on a remplacé la bière par le maté. Rien ne va plus. Mais on tient à replacer l’église au milieu du village : rien – mais alors RIEN – ne nous arrêtera. Enfin… presque !
Altar – Urne
On ne va pas se mentir : à l’extérieur, la chaleur devient presque irrespirable. Alors autant te dire que l’idée de se faufiler sous la tente de l’Altar relève du défi physique. Le passage chez Urne est donc bref, mais suffisant pour capter l’essentiel. Le trio britannique, fer de lance d’un death metal progressif teinté d’influences à la Mastodon et soutenu par Gojira, délivre une prestation d’une précision redoutable.
Tout sonne juste, carré, et l’on sent chez eux une simplicité sincère, une générosité scénique qui force le respect. En d’autres circonstances, on serait resté jusqu’au dernier riff car le jeu en vaut la chandelle. Mais la chaleur accablante nous contraint à écourter l’expérience. C’est donc à contrecœur que l’on se dit que nous pourrons nous consoler avec A Feat Of Sorrow, leur dernier album, que nous te conseillons d’ailleurs sans détour.

MainStage 1 – D.A.D.
Les températures extrêmes permettent d’accéder très facilement aux MainStages, en ce troisième jour puisqu’une bonne partie des festivaliers sont sous les rideaux d’eau ou allongés dans la forêt du Muscadet.
Disneyland After Dark dit D.A.D. débarque et avec eux, pas de place pour la demi-mesure : le show est garanti, et les foules bougent dès les premières notes. Les Danois ne sont pas là pour faire dans la dentelle : ils aiment le rock’n’roll pur et dur, et comptent bien nous le faire savoir. Les frères Binzer mènent la danse avec une énergie communicative et une complicité qui fait plaisir à voir. Forts d’une discographie bien fournie, ils piochent dans plus de douze albums pour livrer un set dense et généreux. Jihad, Girl Nation, Grow or Pray ou encore le très attendu Everything Glows : les titres s’enchaînent sans temps mort et traversent les époques avec efficacité.
Un concert solide, porté par un vrai sens du partage avec le public, et conclu par une ovation largement méritée.


Warzone – The Chisel
Venue tout droit de Londres, cette formation de punk oi! fait partie des très belles surprises de cette édition 2025. Malgré une chaleur écrasante en ce début d’après-midi, qui nous contraint à écourter – encore une fois – l’expérience après une vingtaine de minutes, l’impact est immédiat. Formé en 2020, le jeune groupe nous laisse pantois devant tant d’énergie brute et de refrains taillés pour le live.
Le batteur, véritable machine, envoie la sauce pendant tout le set en assurant un tempo sans relâche, tandis que le chant, assuré par le charismatique et jovial Callum Graham, évoque par moments un certain Frank Carter. Il se distingue par sa justesse et sa puissance impeccables. Programmés au prochain Sylak, on a déjà hâte de les retrouver sur une petite scène et bénéficier de la proximité de notre festival préféré de Saint-Maurice-de-Gourdans.
Valley – Conan
On continue de cramer. La chaleur est écrasante, mais ce concert l’est encore plus. Sous le brumisateur géant, à gauche de la scène, une foule de petits malins s’est installée stratégiquement. Dès les premières minutes, Conan déchaîne un véritable raz-de-marée de basses qui vient frapper en pleine poitrine. Le ciel est chargé, il fait de plus en plus lourd, mais même les nuages ne suffisent pas à tempérer la chaleur, renforcée par un soleil perçant. Pourtant, rien n’entame la détermination du public, bien décidé à honorer comme il se doit le doom massif des Britanniques.
Les festivaliers affluent, secouant la tête au rythme de ce mur sonore implacable, affublés de bobs colorés ou Cochonou, comme pour mieux contraster avec la noirceur du set. Une performance monolithique, sans concession, qui nous a littéralement happés. Conan n’a pas besoin d’en faire des tonnes : leur présence scénique et la densité de leur son suffisent à marquer les esprits. Un vrai coup de cœur.
Warzone – Nasty
Quand on va à la Warzone, qu’est-ce qu’on veut ? On veut de la bagaaaarreeee !
Nasty débarque un peu avant 17:00, et là… c’est comme si on lâchait une meute de molosses dans un magasin de porcelaine : rien n’est épargné. Les Belges balancent un hardcore gras et sans détour avec la subtilité d’un coup de bélier, et la scène devient instantanément une arène.
Pour le coup, la Warzone est bondée et l’ambiance électrique. Les slammeurs s’enchaînent sans répit. Nos voisins belges, eux, se déchaînent et guident le public vers toujours plus de folie. Entre deux nuages de poussière, des jetés de pichets et une évacuation sur civière (on espère d’ailleurs que la personne est en bon état à ce jour), le parterre vit un moment à la fois brutal et fédérateur. Si la température écrasante a forcé pas mal de monde à profiter du set en marge du carnage central, impossible de ne pas être emporté par l’énergie frontale du groupe. Pas besoin de te faire un dessin : Nasty livre une performance qui tabasse et on ne peut que te conseiller d’aller les voir lorsqu’il passeront près de chez toi. On ne sort pas indemne d’un concert comme ça, on sort avec le sourire aux lèvres (et parfois trois côtes en moins).
MainStage 1 – Myles Kennedy
En cette journée placée sous le signe des légendes du rock, Myles Kennedy s’impose comme une figure incontournable. Connu pour son rôle central dans Alter Bridge et sa collaboration avec Slash, le frontman dévoile ici une facette plus personnelle mais tout aussi puissante de son univers.
En solo, Kennedy démontre avec aisance la richesse de son jeu de guitare et la portée exceptionnelle de sa voix. Dès son arrivée sur scène, il affiche une joie communicative, partageant sans retenue son plaisir d’être là avec un public conquis. Il met en avant les titres de son dernier album dans un set dynamique et bien construit : The Art of Letting Go, Devil on the Wall, Behind the Veil, Get Along ou encore In Stride s’enchaînent avec énergie.
Une prestation soignée, maîtrisée, et surtout pleine de passion, qui donne clairement envie d’en entendre plus.

Warzone – Stick To Your Guns
Petit moment de détente avant d’entrer dans le vif du sujet : Take on Me résonne au cœur de la Warzone, tout le monde chante et danse. Puis dans la fosse explose un énorme moshpit et l’ambiance monte en flèche. Le groupe entre en scène. Les premiers riffs de Stick To Your Guns frappent droit dans les tripes, provoquant une nuée de corps en mouvement. Comme si on n’avait pas reçu assez de poussière dans les bronches, un wall of death arrive comme une délivrance… ou un coup de grâce. Heureusement, les brumisateurs à proximité permettent de reprendre son souffle, car dans la foule, la température grimpe.
Pas de répit non plus côté énergie : entre les circle pits et les vagues de slameurs qui s’enchaînent, le public est en ébullition du début à la fin. Côté prestation, si l’on ne peut rien reprocher à l’engagement scénique du groupe ni à l’impact de ses compos hardcore, il faut reconnaître que le chant, parfois approximatif, finit par lasser sur la durée. Une performance pleine de sueur et de puissance, qui aurait gagné à un peu plus de nuance dans l’interprétation vocale.
MainStage 1 – Black Country Communion
Black Country Communion est le supergroupe du jour. Quand Glenn Hughes, Joe Bonamassa et Jason Bonham partagent la scène, difficile de résister. Sur la MainStage, les foules se pressent pour assister à un moment rare, et l’attente est largement récompensée. Ça joue fort, ça joue juste, et surtout, ça joue avec une classe folle. Impossible de ne pas être transporté par la voix intemporelle de Hughes, véritable machine à remonter le temps vers les années 70, tandis que Bonamassa livre une performance de haute voltige à la guitare. Des titres comme One Last Soul, Red Sun ou Stay Free résonnent puissamment et laissent le public sans voix.

Altar – The Ocean
Notre périple de ce troisième jour prend un tout autre tournant avec The Ocean. On les attendait, on trépignait d’impatience et on n’est pas déçus de voyage. Sous la tente de l’Altar, on oublie le soleil et la poussière pour plonger dans l’atmosphère enveloppante du collectif allemand. On trouve même une place, non loin de la scène, bénéficiant d’un petit air frais ! Le grand luxe.
Le set, découpé par albums, nous embarque dès les premières notes avec des titres comme Jurassic | Cretaceous ou Triassic qui vibrent dans tout le corps. Au chant, Loïc Rossetti, aussi habité que précis, capte l’attention à chaque instant. Une semaine avant, il annonçait son départ. Et quel dommage quand on voit l’intensité de ce concert ! Lors sa dernière avec le groupe, il se donne à fond, descend au contact du public qui le porte à plusieurs reprises. Même lorsque le groupe glisse vers des sonorités plus ambient, la tension reste intacte. Un moment fort, beau, presque hors du temps qu’on voudrait ne pas voir se terminer. C’est carrément et clairement le highlight de cette troisième journée.

Warzone – Terror
La soirée est déjà bien entamée, pourtant, côté Warzone, la chaleur remonte d’un cran ! Pourquoi ? Parce que Terror est sur le point de monter sur scène. Et quand l’un des piliers du hardcore américain débarque, c’est plus le moment d’aller chercher de l’eau !
Originaire de Los Angeles, le groupe emmené par Scott Vogel est une référence incontestée de la scène hardcore mondiale depuis plus de vingt ans. Sur disque comme sur scène, leur réputation n’est plus à faire : brutalité maîtrisée, discours rassembleur, et énergie débordante. Et ce show en est la preuve. Dès l’intro, on sent que ça va cogner. Menant la danse, la fureur dans les yeux, Vogel ne cesse d’interpeller la foule, encourageant les pogos et galvanisant un public déjà en ébullition.
Côté setlist, des classiques comme Keepers of the Faith, Return to Strength, One with the Underdogs, mais aussi des titres récents tirés de Pain Into Power (2022) comme Can’t Help but Hate. Le groupe envoie des salves de riffs tranchants, des breaks violents et une section rythmique à l’efficacité militaire.
Terror, comme a son habitude, a retourné la Warzone. Et une fois n’est pas coutume, le groupe a quitté la scène avec vingt minutes d’avance. On ne leur en veut pas, on connaît la bête ! Le public est vidé. Merci, au revoir.

Altar – Leprous
Il est presque minuit quand la tente Altar se remplit avec ferveur pour accueillir Leprous, les maîtres norvégiens du metal progressif. Le public est au rendez-vous, bien décidé à ne pas manquer ce moment suspendu. Dès les premières notes, le ton est donné : un son dense, profond, souligné par un jeu de lumières chaudes qui dessine les silhouettes des musiciens comme des ombres chinoises en mouvement. L’atmosphère se charge d’émotion, et très vite, chacun se laisse emporter.
La force de Leprous, c’est cette capacité à allier virtuosité, intensité sonore et sincérité émotionnelle. Illuminate, Below, Slave ou Atonement résonnent comme autant d’incantations, frappant l’auditoire droit au cœur. La voix d’Einar Solberg, magnétique et bouleversante, glace l’échine autant qu’elle élève. Chaque mot, chaque note, semble pesé, incarné. Dans la fosse, on chante à l’unisson, porté par la beauté brute de l’instant.
Le temps semble se suspendre sous la tente, le concert passe bien trop vite !
Warzone – Turnstile
On enchaîne direct avec un bon shot de hardcore venu tout droit des États-Unis pour se remettre les idées en place et finir la soirée. Et qui mieux que Turnstile pour ça ? On les attendait de pied ferme et on a couru à leur rencontre. Alors que la température commence enfin à redescendre, l’ambiance, elle, reste brûlante. Le public ne tient plus en place et acclame les Américains, très appréciés du milieu. Et pour cause. Ce soir, ils nous ont concocté une setlist efficace : Fazed Out, 7, Keep It Moving, Pushing Me Away… tout y passe. Enfin presque. On finit par entendre les oiseaux chanter… une ambiance apaisée enveloppée de tons bleutés s’installe. On reconnaît le très attendu Birds qui clôture le concert dans un merveilleux bordel.
Turnstile, l’une des sensations hardcore les plus marquantes de ces dix dernières années, est un véritable bol d’air frais sur une scène qui tourne parfois en rond. Le groupe casse les codes en proposant de nouvelles lignes de conduite, sans jamais perdre l’essence de ce qui fait battre le cœur du punk-hardcore : une énergie folle et une sincérité évidente. En une cinquantaine de minutes qu’on n’a pas vu passer, les Américains ont lessivé la Warzone et reboosté tout le monde pour repartir danser jusqu’au bout de la nuit du côté de chez Michel Mercury.

Metal Corner – Michel Mercury
Les concerts de la journée sont déjà finis. On a tellement souffert de la chaleur qu’on décide de se refaire une santé avec la légende du kitsch au Metal Corner : Michel Mercury. Si les playlists manquent parfois de surprise, l’ambiance “Miss Camping” est bien là, assumée et jubilatoire. On se marre bien et on se laisse prendre au jeu très facilement, il faut l’avouer. Dans la foule, il faut 8000°C mais ça slame sur Britney et ça growl sur Émile & Images. Le public, dans un esprit bon enfant, se métamorphose tour à tour en fan des années 80, 90 puis 2000. Même les plus exténués finissent par se laisser embarquer dans ce grand n’importe quoi.
Il est quasiment 03:00 lorsqu’une partie de l’équipe choisit de rentrer se reposer. Les plus vaillants s’en vont achever cette folle journée sur le dancefloor du Macumba. Parce qu’au Hellfest, la fête ne meurt jamais vraiment…
Texte : Floriane Piermay, Hiromi Berridge et Marjorie Delaporte.
Photos : Chris Sifaka







