Soirée surprise et a priori electro au menu pour la venue d’Alan Sparhawk (of Low) et Circuit des Yeux. Le premier, musicien protéiforme, a sorti un album solo déroutant (‘White Roses, My God’, Sub Pop Records, 2024) pour exorciser la douleur née de la perte de sa compagne de vie et de scène, Mimi Parker, des suites d’un cancer en 2022. L’accent est mis sur les beats et le vocoder. Quant à Circuit des Yeux (aka Haley Fohr), icône de la scène underground de Chicago, elle emprunte aussi bien à l’electro, à la dark wave qu’à la musique expérimentale entre autres courants musicaux.

Avec un nouvel album (‘Halo On The Inside’, Matador Records UK) à paraître le mois prochain, Circuit des Yeux nous a mis l’eau à la bouche avec plusieurs titres inédits et envoûtants comme ‘Megaloner’ et ‘Canopy of Eden’. Haley Fohr joue une dark wave sur laquelle elle pose sa voix puissante couvrant quatre octaves, un chant confinant tantôt aux incantations de prêtresse, tantôt aux envolées lyriques d’une cantatrice. Des réminiscences de Massive Attack, Dead Can Dance ou des albums de jeunesse de Depeche Mode s’imposent à nous. Une artiste originale qui ne laisse pas indifférent.

On était très curieux de voir sur scène l’interprétation d’Alan Sparhawk de son premier album solo, ‘White Roses, My God’. On l’a déjà dit, un album créé dans le deuil et une démarche résiliente de l’artiste qui adore se renouveler et explorer de nouveaux horizons musicaux, mais une création qui nous avait laissé perplexe de prime abord avec son côté electro brut inattendu. Il faut dire qu’en live, les titres prennent une autre dimension. Le chanteur de Low, vêtu d’une salopette et d’un sweatshirt s’affaire à bidouiller sa table de mixage, accompagné de son fils Cyrus à la basse. Il arpente la scène comme un lion en cage, sautille et ondule au rythme de sa musique synthétique. Le premier titre – et le plus intéressant – est ‘Get Still’, avec un mid-tempo immersif et une mélodie sinueuse et répétitive comme un mantra.

Alan enlève lentement son sweatshirt et le garde enroulé contre son bras, comme un enfant avec son doudou. Il joue avec ce vêtement en l’entortillant tout en dansant en rythme. On peut y voir l’image d’une mue, l’artiste se débarrassant d’un carcan de douleur et d’attaches terrestres parasites pour montrer son âme simple et nue. Transition musicale émouvante avec ‘Heaven’, sur lequel le musicien lâche la boîte à rythmes pour empoigner sa guitare et interpréter délicatement cette courte chanson liée à la perte de sa compagne, bouleversant.

Toute la seconde partie du concert sera intimiste, Alan au chant et à la guitare, son fils Cyrus à la basse, enfilant des perles musicales. Le set s’achève avec l’intense ‘No More Darkness’ et pour seul rappel, ‘White Horses’, un petit chef-d’œuvre de Low. Très sobre dans ses remerciements mais visiblement heureux de l’accueil réservé par le public du Casino Théâtre de Genève, Alan lui lance des encouragements à « s’aimer et se respecter les uns les autres, que chacun le fasse à son niveau dans un monde qui a tant besoin de ces valeurs ».