Voici déjà plus d’un demi-siècle que Pentagram façonne le heavy rock. Toujours emmené par la légende vivante, Bobby Liebling, le groupe n’en finit pas de surprendre et signe en 2025 un retour percutant avec ‘Lightning in a Bottle’. À ses côtés depuis un an : Tony Reed, guitariste-chanteur culte de Mos Generator, ingénieur du son et producteur respecté. Un maître dans son art. Rencontre exclusive au Hellfest 2025 avec deux figures à la croisée des générations.
Pentagram existe depuis plus de 50 ans. Bobby, que représente ce chiffre pour toi aujourd’hui ?
Bobby : C’est un véritable honneur de porter ce drapeau aussi longtemps. Et en réalité, cette année, cela fait même 54 ans. C’est encore plus impressionnant, c’est énorme !
Est-ce que tu t’attendais vraiment à sortir encore des disques en 2025 ?
Bobby : Non, je pensais que je serais à la retraite et multimillionnaire ! (rires) Mais ça n’est pas arrivé… alors je poursuis mon chemin.
Tony, que cela signifie-t-il pour toi d’avoir rejoint une légende du doom depuis 2024 ?
Tony : J’étais déjà fan. Pour moi, c’est l’opportunité idéale de jouer une musique que j’adore, mais aussi de pouvoir y apporter ma touche, de prendre part à cet héritage, de le maintenir vivant et en bon état.

Justement, toi qui es producteur, as-tu cherché à préserver l’ADN du groupe ou plutôt à le bousculer ?
Tony : Je crois qu’avec Henry (ndlr. Vasquez, à la batterie), Bobby et moi, on fait un peu des deux. Henry et moi avons composé 19 morceaux qu’on a soumis à Bobby. Il a choisi ceux qu’il voulait et y a ajouté sa patte. On a repris un ancien titre de Pentagram, ainsi que d’autres morceaux plus récents.
Je pense qu’on a un peu secoué les habitudes, en proposant un disque plus proche du rock traditionnel. C’était le choix dès la sélection des chansons : leur donner ce petit parfum hard rock des années 70.
Bobby : Il faut dire qu’on ne se considère pas du tout comme un groupe de doom metal. On joue simplement du hard rock.
Ok, mais réalisez-vous que toutes les scènes stoner et doom vous considèrent aujourd’hui comme des modèles ?
Bobby : Beaucoup, beaucoup de gens me l’ont dit ! Mais je n’écoute pas vraiment de doom. On fait bien quelques morceaux lents et lourds, un peu sludge, mais pour moi, ça fait juste partie du hard rock, tel que je l’ai connu à mes débuts.
Combien de temps a pris la production du dernier album ?
Tony : Si l’on additionne vraiment le temps consacré à l’écriture et à l’enregistrement, environ trois semaines. Peut-être un mois, au maximum. Quand on considérait les morceaux comme aboutis, je n’avais encore jamais rencontré Bobby. La première fois qu’il est venu, c’était directement au studio.
Bobby : On ne se connaissait pas !

Et le courant est passé tout de suite ?
Tony : Absolument. On a passé des heures à écouter du garage rock et des groupes obscurs des années 60 et 70.
Bobby : On a découvert qu’on avait les mêmes goûts !
Tony : Oui, on aimait tous ces sons un peu bruts, le côté garage et underground. Ça a tout de suite créé un lien et rendu la suite plus facile.
Quel morceau reflète le mieux la place de Pentagram en 2025 ?
Tony : C’est difficile à dire, car l’album est très varié. On peut plutôt évoquer les titres qu’on aime particulièrement jouer.
Bobby : Exactement, c’est vraiment une question de goût personnel. J’adore ‘In the Panic Room’ pour son feeling et sa fluidité. Et ‘I Spoke to Death’ parce qu’elle est tellement jouissive sur scène : c’est simple et lourd.
Tony : ‘Thundercrest’ est probablement la chanson qui fait le plus réagir le public. C’est un véritable “ball breaker”, ce genre de riff implacable. Tu vois la foule entrer dedans…
Bobby : … c’est tonitruant !
Tony : Oui ! Si je devais n’en choisir qu’une, ce serait sans doute celle-là.
Ce n’est pas votre première venue au Hellfest. Ce festival est-il spécial pour vous?
Bobby : Absolument. Le Hellfest est l’un des plus grands festivals au monde. Il réunit des noms incroyables. Et j’adore la façon dont tout est organisé : c’est très bien ficelé. C’est presque une véritable ville ! Pas seulement un festival, mais une cité qui se construit pendant des semaines.
Tony : C’est la troisième fois que je joue ici. Et je ressens exactement la même chose : c’est remarquablement organisé, et les programmations sont toujours fabuleuses. Et le festival porte bien son nom : il fait vraiment une chaleur infernale !
Bobby : Oui ! On rôtit littéralement ! (rires)
Comment le public français se distingue-t-il du public américain ?
Bobby : Pour moi, le Hellfest rassemble un public universel et international. Ce n’est pas un public “français” à proprement parler. Même si cela se déroule en France, les spectateurs viennent du monde entier.

À quoi peut s’attendre quelqu’un qui découvre Pentagram en 2025 sur scène ?
Tony : Je dirais qu’il y a une grande camaraderie sur scène. Quand on se trompe, on continue, on garde la cohésion.
Bobby : Il y a vraiment une fraternité, plus forte que jamais, plus que lors des premières années. Et j’adore ça.
Tony : C’est aussi parce qu’avec Scooter (ndlr. Haslip, bassiste) et Henry, je joue depuis très longtemps. Je connais Scooter depuis 1988, et Henry depuis vingt ans. Quand on monte sur scène ensemble, on est comme des frères. Et on savait exactement ce qu’on allait apporter à Bobby. Tout s’est emboîté comme un puzzle.
Bobby, on doit parler du fameux mème sur Instagram. Que s’est-il passé ?!
Bobby : (éclats de rires) Je fais de la musique depuis cinquante ans, et je deviens célèbre grâce à un mème ! C’est… c’est… amusant en soi. Mais ça compte beaucoup pour moi, parce que ça a permis de faire connaître le groupe, que notre expression soit entendue et atteigne un autre niveau.
Je fais de la musique depuis cinquante ans, et je deviens célèbre grâce à un mème ! – Bobby Liebling
Comment as-tu réagi la première fois que tu l’as vu ?
Bobby : La première fois, je me suis dit : « Oh mon Dieu, je fais la même chose depuis 42 ans ! Je suis dans Pentagram, et je fais encore cette tête… » C’est juste que j’adore fixer les gens. Avant, on faisait ça pour essayer de leur faire peur ! Quand on jouait dans de petites salles, on se disait : « On va leur foutre la trouille !«
Si vous deviez décrire Pentagram version 2025 en un mot chacun ?
Tony : C’est la pire question ! (rires) (s’adressant à Bobby) Allez, tu dis ton mot, et je dirai l’autre ? Ou alors on en donne deux ? Trois ? Je peux dire deux mots ?
Bobby : Oui, vas-y.
Tony : Heavy. Intense.
Bobby : Ça fonctionne parfaitement.
Propos recueillis au Hellfest 2025 par Floriane Piermay.
Photos : Chris Guillaudin – Sifaka






