Ça y est, c’est bien vrai. Les Cowboys Fringants révèlent leur – très attendu – nouvel album Pub Royal, qui a vu le jour le 25 avril 2024. À peine sorti et déjà considéré comme mythique, ce douzième opus contient les dernières chansons originales du groupe avec leur chanteur Karl Tremblay, décédé en novembre dernier des suites du cancer, à seulement 47 ans.
Rassemblant treize morceaux de folk rock aux sonorités typiques de nos Cowboys, Pub Royal se présente comme une œuvre testamentaire, le tout coréalisé par Gus Van Go et Daniel Lacoste. Six chansons sont interprétées par Karl, écrites à l’origine pour la comédie musicale du même titre, à laquelle s’ajoutent quatre autres inédites et trois instrumentales. Suite au décès de ce dernier, les trois membres endeuillés poursuivent le développement de l’album autour de ces enregistrements. Cet effort de cohérence engendre des procédés inusités pour un album de la formation lanaudoise. On y trouve un duo entre Marie-Annick Lépine et « son gros » sur Loulou vs Loulou, ils n’avaient chanté ensemble que sur les disques solos de cette dernière. La célèbre violoniste et multi-instrumentiste se fait aussi entendre avec Jean-François Pauzé sur Merci ben!, chanson qui raconte leurs glorieuses, comme leurs catastrophiques, épisodes vécus durant la carrière du groupe. Qu’on en rit ou qu’on en pleure, l’intégration dans cette pièce d’un échantillonnage de la voix de Karl en spectacle, parlant à la foule, nous émeut aux larmes.
D’ailleurs, celle-ci signe et interprète Les cheveux blancs, qui s’adresse à ses filles, celles qui, aujourd’hui, se retrouvent sans père. Tantôt festif, tantôt émouvant, l’album balance entre les pièces rythmées et calmes traitant de la vie comme de la mort avec vérité et précision, sans tomber dans l’apitoiement, mais surtout avec l’authenticité si appréciée du populaire quatuor. La pièce Questions sans réponses, quant à elle, laisse deviner un potentiel succès radiophonique.
Comme toujours, le talent d’auteur-compositeur de Jean-François Pauzé, qui chante sur la pièce Vie et mort de Gina Pinard, atteint des sommets et mérite qu’on y porte longuement attention. Fidèle à lui-même, la plume du groupe, qui rédigea Les étoiles filantes et plusieurs autres hymnes, nous saisit et nous touche comme jamais. La fin du show en est un exemple frappant avec sa manière aussi frontale d’aborder la mort. L’interprétation de Karl, à la fois résiliente et fragile, dégage lucidité et résignation. Les paroles parlent d’elle-même :
« Ferme le follow pis les lumières
Non j’ai plus besoin qu’on m’éclaire
Je sors par la porte d’en arrière
Pour que m’avale l’Univers… »
–La fin du show
Difficile de rester de glace avec une chanson aussi poignante. Une telle lettre d’adieu sur disque se voit rarement et dans les circonstances, on ne peut que se réjouir d’y avoir eu accès. Visiblement, Pauzé y dépeint un hommage grandiose pour son meilleur ami. Un nouveau classique est né.
Les Cowboys Fringants ont profondément marqué la culture québécoise et même l’ensemble de la francophonie. Après une écoute attentive de leur nouvel album, nous pourrions hésiter entre l’envie de leur dire adieu, merci ou au revoir. Et si c’était les trois à la fois?
Chose certaine, ce testament musical légué par Karl Tremblay contribuera à immortaliser le regretté chanteur dans nos cœurs. L’engouement suscité par la parution de Pub Royal confirme une fois de plus que nos Cowboys savent créer l’évènement. Beaucoup s’en souviendront comme d’un évènement transitoire entre le passé et l’avenir. La culture, c’est aussi ça.
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𝗖𝗗 𝗮̀ 𝘃𝗲𝗻𝗶𝗿 𝗹𝗲 𝟭𝟬 𝗺𝗮𝗶
𝗩𝗶𝗻𝘆𝗹𝗲 𝗽𝗿𝗲́𝘃𝘂 𝗮̀ 𝗹’𝗲́𝘁𝗲́ 𝟮𝟬𝟮𝟰
Illustration de la pochette : Pat Hamou Illustration and Design
