Pratiquement quatre ans après son dernier passage dans la salle lausannoise, Laibach était de retour aux Docks.

L’avantage avec le groupe Slovène est que chaque tournée est complètement différente des précédentes. Il faut dire que leur discographie est elle aussi très diversifiée. C’est donc un peu surprenant de voir le concert débuter pratiquement comme il s’était terminé en 2019 : Milan Fras avec chapeau de cow-boy, Marina Martensson à la guitare et le même groupe pour les accompagner. Un peu comme pour effacer cette période pourrie par la pandémie entre les deux concerts. Cela commence avec « Love is Still Alive », le titre de leur dernier EP sorti la veille. Et cela s’enchaîne avec … »Love Is Still Alive » encore 4 ou 5 fois, toujours dans une version différente (comme sur l’EP), dont une purement instrumentale qui claquait bien. Un exercice intéressant et probablement inédit (personnellement je n’avais jamais vu cela). Peut-être une manière de mettre l’accent sur le message véhiculé par la chanson, histoire de rappeller que souvent le fond est plus important que la forme. J’avoue que pour ma part, on aurait quand même pu zapper au moins 1 ou 2 déclinaisons.

40 minutes donc pour nous convaincre que l’amour est toujours en vie, avec Milan et Marina qui reviennent quelques instants sur la dernière version du morceau, avant l’intermezzo chronométré de 15 minutes. Et si jamais vous n’aviez pas bien écouté ce premier set, la sono nous joue « Love Is Still Alive » pendant l’entracte.

Le retour sur scène, avec une ponctualité qui ferait honneur à la réputation des Suisses, est d’une toute autre trempe : d’abord « Ordnung und Disizplin », plus doux que son titre ne laisse imaginer, avant un autre extrait de l’album « Wir Sind Das Volk ». Fini le délire cowboy, Milan a revêtu son costume sombre et sa fameuse coiffe. Le spectacle est désormais comme il se doit lourd et menaçant avec des projections en arrière-fond vraiment excellentes. Le groupe est toujours aussi bon. A part le batteur dont je ne me rappelle pas le visage, les autres membres font partie du collectif depuis plusieurs années et cela s’entend. Mention spéciale au guitariste qui sait absolument tout faire. En plus, le son est particulièrement bon ce soir avec des basses puissantes mais contrôlées.

L’album précédent « The Sound Of Music » joué en entier sur la tournée précédente passe à la trappe. On a en revanche droit à des extraits du disque « Also Sprach Zarathustra ». Milan Fras s’aide d’un prompteur, mais comment le blâmer. Pas facile de réciter du Nietzsche de mémoire.

Laibach joue ensuite deux titres que je découvre (« Glück Auf » et « Lepo – Krasno ») et qui s’insèrent bien dans le set. Cela sonne un peu comme le Laibach des débuts et cela tombe bien car ensuite c’est l’heure des classiques avec « Smrt za Smrt » et « Ti Ki Izzivas ». Probablement la meilleure version que je n’ai jamais entendue de ce dernier titre. Dommage que Mina Spiler ne soit pas présente sur scène et que l’on doive se contenter de samples de sa voix (elle apparaît quand même sur les images projetées avec son mégaphone). Le set se conclut ainsi de manière surpuissante.

Le rappel n’est pas acquis comme l’indique l’écran vidéo (Maybe we will be back, maybe we won’t). Le suspense est de courte durée tant la salle est conquise. 600 personnes qui applaudissent fort et voilà l’heure des reprises avec d’abord « The Future » du poète canadien. Quand je l’ai entendu il y a quelques semaines, j’étais un peu mitigé car Leonard Cohen est un artiste que j’aime énormément et j’avais un peu de peine à accepter qu’il passe au traitement Laibach. Mais en fin de compte, la voix encore plus grave de Milan va à merveille pour ce morceau. Un autre classique « Sympathy For The Devil » est joué avec entrain et ce sont surtout les images video qui attirent l’attention, avec beaucoup de photos bien choisies d’un certain Vladimir P., en lice pour le titre de vilain ultime du XXIème siècle.

Comme l’an passé, le dernier morceau est « The Coming Race », mais Laibach ne peut pas faire deux fois la même chose, donc il faut finir autrement. Il y aura ainsi un second rappel d’un titre: « Getting Closer » (titre indiqué sur setlist.fm) que je n’avais jamais entendu. Un duo très tranquille à deux voix. Belle chanson mais le mariage des voix ne fonctionnait pas très bien à mon goût. Tonnerre d’applaudissements et longues salutations du groupe avant de sortir définitivement de scène. C’est clair, il n’y aura pas de troisième rappel (We won’t be back, c’est écrit) et la sono lance un remix electro de « The Future » comme pour nous indiquer qu’il est l’heure d’aller retrouver le dancefloor sous la direction éclairée de Herr Liebe pour la suite de la soirée.

Une fois encore, un concert aussi surprenant que splendide de Laibach, avec des moments vraiment magiques. Merci Les Docks de continuer à programmer ce groupe dans votre salle.

PS: pour les curieux, voici ce que nous écrivions en 2019 sur le concert aux Docks (lien) et celui de 2018 à la Dampfzentrale bernoise (lien).