DRF : Ben Vasa, présente-toi en quelques mots ?
Ben Vasa : Globe-trotteur avec une base
DRF : Comment en es-tu venu à la peinture ?
Ben : C’est ma maman (rires) elle m’a offert un coffret de peinture quand j’étais jeune. J’ai eu par la suite une grosse rupture sentimentale qui m’a empêché de dormir et au lieu de m’énerver ben je me suis mis à la peinture et j’ai évacué. Pour moi c’est de l’art thérapie. Je ne fais pas ça pour en vivre car je suis déficitaire vue le nombre de bombes que j’achète, mais j’ai besoin de ça pour évacuer.
DRF : Hormis la peinture, tu t’intéresses à la pierre aussi ?
Ben : Ben oui effectivement je fais mes deux passions sur terre. La nuit quand je n’arrive pas à dormir je peins ou quand il faut faire des peintures en live sur des festivals. Et la pierre le jour. C’est mon alimentaire. C’est ce qui me permet de ramasser des sous pour réaliser mon rêve.
DRF : C’est quoi ton rêve ?
Ben : Mon rêve c’est de monter une friche artistique dans le Verdon. Un truc totalement ouvert. Avec un grand hangar agricole avec de la hauteur pour faire venir du monumental. La propriété je l’ai déjà, mais il y a les travaux à faire et ça c’est très coûteux. Il y a un grand champ avec plusieurs accès, ça sent le gros festival d’été, ça sent les résidences d’hiver avec les artistes. C’est un gros projet, on verra où il va.
DRF : Quelles sont tes influences dans ton art ?
Ben : Tous les petits artistes que j’ai rencontrés au cours de mes voyages comme par exemple Fitsum un peintre érythréen rencontré sur Nairobi, avec qui j’ai traîné pendant un an. Après il y a aussi Picasso, Dali et Guayasamin. C’est les principaux. Picasso surtout, car c’est quelqu’un qui a pris un bout d’art chez chaque personne. Picasso et Dali pour la folie. Et Guaya pour son parcours.
DRF : Comment te viennent l’inspiration et l’orientation de tes œuvres ?
Ben : En fait à chaque fois que je commence une toile, je sais qui je vais peindre, car je le dessine avant. Pour ce qui est de la couleur c’est totalement libre c’est mon intérieur à moi. Pour la sculpture c’est exactement pareil. Je me mets devant le bloc avec ma disqueuse et je sors ce qui arrive.
DRF: Faut-il parfois y voir certaines revendications politiques à travers ton art ?
Ben : Parfois oui. Quand tu fais Malcom X, quand tu fais Martin Luther King oui. Plus en Street art. En fait, ce n’est pas de la politique c’est de l’humanisme. Et ça c’est le problème actuel de la politique. Si on fait de la politique pour faire ce qui se passe en ce moment ce n’est pas possible. L’être humain est plus rayonnant que cela il faut savoir lui faire développer son potentiel.
DRF : D’ailleurs tu es un fervent défenseur des valeurs provençales puisque tu t’investis dans le collectif « Aïoli Var » tu peux nous en parler un peu ?
Ben : « La Provence n’est pas à vendre mais à partager. » C’est une Chourmo de Massilia. Ils ont créé la première il y a 10 ans. Il y en a maintenant une bonne dizaine à travers le sud. C’est un collectif monté pour promouvoir les idées du Massilia.
DRF : Bon venons-en au festival de Néoules : ça fait combien d’années que tu participes en tant que plasticien bénévole dans le festival ?
Ben : À la base j’ai commencé sur le festival à la régie technique. Au départ j’ai bossé à 14 ans sur « le festival des collines » et les deux festivals ont fini par fusionner entre guillemets. Je me suis retrouvé sur Néoules, car à l’époque cela était dans ma philosophie. Il y a toujours un bon esprit, mais ça reste basé sur les têtes d’affiche et le rendement. Après pour en revenir à ta question, je suis ingénieur en courant faible et fort. J’ai aidé à faire les installations électriques du festival. Un soir dans un festival à Saint Julien un groupe « Le Tabarnak », pour qui je m’occupais de mettre en place sur divers fest les installations électriques, m’ont proposé de barbouiller et j’ai commencé à peindre en live dans ce festival. Avec eux on a demandé à investir un coin du festival pour reproduire la chose. Mais bon les festivals ce n’est pas toute ma vie. J’ai eu l’occasion en Afrique d’avoir mon atelier et là je me suis lâché.
DRF: Cette année tu t’occupes d’une partie de la mise en décor du site : pourquoi t’investir sur cette partie dans ce fest ?
Ben : Cette année j’ai eu très peu de temps, à cause de l’ouverture de mon atelier de marbrerie, pour m’investir sur une prestation live. Par ailleurs «Le Tabarnak » est en dépôt de bilan, on avait donc plus de statut juridique pour faire des demandes de fonds et je trouvais ça super sympa de mettre en place des rencontres avec des graffeurs et d’apprendre de leurs techniques.
DRF : Qu’est-ce que tu proposes donc comme apport pour la déco du festival ?
Ben : La mise en place d’une expo de portraits, d’humanistes et de grands de ce monde, mais aussi de petits qui m’apportent chaque jour quelque chose. Le but était surtout de mettre en valeur l’entrée du festival afin de rythmer l’arrivée des gens. Il n’y avait pas grand-chose et le rythme apporté par les peintures et les couleurs emmènent, je pense, un petit plus.
DRF : Est-ce que tu te retrouves dans l’esprit du festival de Néoules ? De par l’ambiance, les valeurs qu’il souhaite partager ?
Ben : Je me retrouve avec l’énergie de départ de Néoules. Par contre, il y a eu une évolution depuis deux ans avec le renouvellement d’Hervé. En fait maintenant c’est beaucoup plus pro et carrément plus pro plus carré. Et cela emmène certaines tensions et je suis totalement conscient qu’il y a des enjeux mais, il faut savoir être cool. Je me retrouve entièrement sur l’ambiance, les participants, la prog est toujours énorme, je prends mon pied chaque année à travailler ici… enfin travailler à me faire plaisir quoi. C’est un très bon festival.
DRF : Outre le festival sur quel autre projet tu travailles actuellement ?
Ben : Ben il y a un projet d’exposition sur des portraits d’artistes marseillais qui devrait voir le jour à la Friche de la Belle de Mai à Marseille. Après je vois au jour le jour. Là j’ai une vingtaine de toiles qui vont sortir cet été. J’ai deux trois sculptures pour des clients. Mon gros projet est professionnel avec le développement d’une marbrerie dans le Verdon et une école de tailleurs de pierre et de compagnonnage chez moi. Mais bon ce n’est pas gagné on favorise plus facilement financièrement les personnes favorisant l’élevage et l’abattage de masse comme les éleveurs plutôt que des initiatives comme celle-là.
DRF : À contrario qu’est-ce que tu refuserais catégoriquement si on te demandait de peindre ou sculpter pour une asso ou je ne sais qui ?
Ben : Tout membre fasciste …même pour un million d’euro je ne ferais pas Le Pen… si, en porc.
DRF : On vit de l’art en 2015 ou tu as un métier à côté ?
Ben : Non on ne vit pas de l’art, malheureusement. J’ai donc mon atelier de marbrerie.
DRF : Qu’est-ce qui fait qu’on doit voir le travail de Ben Vasa si on en a l’occasion ?
Ben : Ben si t’as une toile en vitrine, la couleur et le mouvement peuvent t’attirer. Je t’avoue avoir plus de reconnaissance maintenant qu’il y a quatre ans alors que je n’ai strictement rien changé. De toute façon, il faut être curieux et ne pas avoir peur de pousser les portes. Aller à la rencontre de l’autre. Quand je fais mes peintures c’est la même chose. C’est une rencontre avec l’artiste ou la personnalité qui me fait kiffer sur le moment.
DRF : Un dernier mot pour la route.
Ben : On va se faire un concert ou quoi ?
Merci à Ben Vasa pour le temps pris et à Éric pour les photos.