JoeLouisWalker_04_byMichaelWeintrob

QUE reste-t-il du Blues aujourd’hui ? Beaucoup de choses. QUI reste-t-il du Blues aujourd’hui ? La question apporte une réponse un tantinet plus nuancée. Il est vrai que les derniers temps ont été durs pour cette musique, en commençant par la disparition de BB King que nous regrettons infiniment.

Les larmes du Mississipi continuent de couler, mais il faut avancer. Les années 2010 sont celles d’une phase de transition dont le chantier est d’ores et déjà bien entamé. Mais qu’on ne s’y trompe pas, la jeune génération continue de côtoyer les briscards du registre.

Des personnages historiques tels qu’Eric Clapton, Buddy Guy ou ici Joe Louis Walker, qui nous revient avec un nouvel opus, « Everybody Wants A Piece », entretiennent corps et âme cette flamme centenaire.

D’ailleurs, qui est Joe Louis Walker ? Pour tout savoir sur l’homme introduit au Blues Hall of Fame en 2013, quoi de mieux que d’interviewer le principal concerné ?

Parler de Blues avec Joe Louis Walker, c’est plonger au cœur d’une histoire où se sont croisés les plus grands artistes du 20ème siècle, toujours vivants ou maintenant disparus.

Aussi, quand on évoque avec lui le blues en 2015, on parle inévitablement de ceux qui nous ont quitté récemment : « BB King et Johnny Winter sont partis. Ils avaient respectivement 89 et 70 ans. On ne retombera jamais sur des gens comme eux. Mais comme on dit, personne n’est éternel, malheureusement. Maintenant, une nouvelle génération arrive et il y a beaucoup de très bons artistes, à commencer par Derek Trucks qui est un mec très talentueux. »

Aussi, la passerelle entre les artistes « classiques » comme Buddy Guy et les plus contemporains est bien instaurée ; et quand on parle avec Joe du Blues en 2015, Joe affirme :

« Ce siècle est marqué par des artistes blues qui font le blues, mais à leur propre façon, en le réinterprétant, en le mélangeant à plein d’autres choses. Les deux artistes qui me viennent à l’idée sont Joe Bonamassa et Gary Clark Jr. Avec des choses biens à eux, ils font beaucoup de bien au Blues en le remettant sur le devant de la scène – ce sont des artistes désormais célèbres qui font de superbes carrières. »

Joe renvoie à des artistes qui ont su se pérenniser dans le temps, tout comme lui. Il faut dire que la longévité du bonhomme force le respect, notamment avec les 25 albums qu’il a pu enregistrer depuis le début des années 80.

Aussi, quand on l’interroge sur le secret de sa réussite, Joe parle de ceux qu’il a pu côtoyer et de ceux qui l’ont soutenu : « c’est très dur de seulement référer à une ou même deux personnes. J’ai été beaucoup aidé en premier par Mike Bloomfield avec qui j’ai collaboré un temps. Après BB King m’a aidé, John Lee Hooker, Freddie King, Albert King… ce sont toutes ces rencontres qui ont contribué à ce que je suis et où je suis maintenant, après c’est très dur de s’en tenir seulement à eux car vraiment beaucoup de gens ont été la pour moi. »

De retour aux affaires avec ce nouveau disque « Everybody Wants A Piece » qui jouit d’une excellente production (assurée par Paul Nelson, ancien producteur et guitariste de Johnny Winter, qui plaque même quelques accords sur l’album) et de chansons très solides, j’ai demandé à Joe si cela n’avait pas été trop difficile de se réinventer encore une fois, au travers de cet opus :

« Bien sur que ça n’a pas été facile. J’ai déjà fait tellement de disques. Je m’estime d’ailleurs chanceux d’avoir pu enregistrer autant d’albums. Ce disque en tout cas est un nouveau challenge, comme à chaque fois. Aujourd’hui, je prends ça d’autant plus comme un challenge qu’il y a de très bons disques et des artistes qui sortent beaucoup d’albums – je pense encore une fois à Joe Bonamassa. Mais c’est un challenge vraiment stimulant. »

Et le challenge est relevé. Le rendu est de qualité et les compositions sont à la hauteur du talent de l’artiste. J’insisterai ici sur la diversité des titres qui jalonnent l’album, avec un travail soigné sur l’équilibre des titres qui s’enchainent naturellement, même si aucun fil rouge n’a été imaginé sur « Everybody wants a piece » : « l’album a été composé chanson par chanson. Il n’y a pas eu de vrai fil conducteur. L’idée était de créer onze bonnes chansons et de les faire coller ensemble pour donner un tout cohérent. »

Je garderai pour ma part à l’esprit le magnifique « gospel blues » et ces nappes d’orgues en rythmique, très appropriées, ainsi que le très groovy « Wade in the Water ». Deux chansons qui ne peuvent m’empêcher d’évoquer une filiation artistique avec le travail d’un certain Robert Cray, au travers de cet incomparable mélange de soul et de blues.

C’est un album qui prend son temps, avec des chansons riches par leurs arrangements et par le cœur qu’a mis Joe Louis dans ses lignes de chants très soignées. Engagé pour la perpétuation du blues auprès des jeunes publics, Joe Louis Walker montre avec ce nouvel album que la musique du Mississipi a encore beaucoup à dire à nous tous, et qu’elle se passe de la technologie pour être efficace. Comment tricher avec le blues ? ça ne se joue pas avec un ordinateur, ça se joue avec le cœur.

Découvrez le nouvel album de Joe Louis Walker qui réussit incontestablement son retour sur le devant de la scène. Un retour qui sera marqué par une tournée qui devrait se dessiner dans les prochaines semaines. Merci en tout cas à lui de sa gentillesse et pour son temps, vous pouvez l’imaginer, très précieux.

« Everybody wants a piece » est d’ores et déjà disponible chez votre disquaire. Immanquable pour tout fan de blues qui se respecte.

Joe Louis Walker, « Everybody wants a piece », 2015, Provogue

www.joelouiswalker.com/

 

 

 

 

 

 

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