Texte: Sandra Lehmann & Pauline Elmer
Photos: Maud Robadey & Andy Gaggioli

©Maud Robadey

Introduction (Sandra Lehmann)

Au matin du troisième jour, la fatigue se fait sentir, mais comme les groupes qu’on attend le plus se produisent aujourd’hui, un regain d’énergie nous gagne à notre arrivée sur le site, à 11 heure, pour interviewer les Backyard Babies. En arrivant au festival à cette heure-ci, on croise soit des festivaliers-zombies, soit des fans de Volbeat prêts à courir pour s’assurer une place au premier rang. Le site ressemble de plus en plus à un champ de bataille, et ses festivaliers aussi : cernes, bleus, griffures et boue semblent faire partie de l’uniforme du jour.

Backyard Babies (Sandra Lehmann)

Lorsqu’on interviewe Dregen, ils viennent de descendre de leur tour bus, et il nous confie ensuite que quelques minutes après leur set, ils doivent se tenir prêt à y remonter pour se rendre à l’aéroport. En effet, le groupe joue aujourd’hui deux concerts. La Suède et la Suisse sont deux pays qui sont souvent confondus, et qui sont pourtant assez éloignés géographiquement… mais apparemment pas pour les Backyard Babies puisque que leur deuxième concert de la journée se trouve à … Norjeboke (Suède) pour le Sweden Rock Festival ! On comprend mieux l’heure de passage du groupe dans le running order (13h20) !

Malgré l’heure, les 4 Suédois déboulent sur scène et s’en donnent à cœur joie. Dregen, le petit guitariste habituellement hyper énergique et ne tenant pas en place, semble tout de même souffrir de l’heure, et paraît plus calme que d’accoutumée, sans parler de sa voix qui sonne encore plus éraillée que d’origine ! Mais il n’oublie pas pour autant de nous gratifier de son ‘duck walk’ et de quelques grimaces.

Depuis la fin de sa pause prise entre 2010 et 2015, on retrouve un groupe motivé et dont la complicité sur scène semble décuplée.

Les Backyard nous balancent leurs petites bombes variant entre sleaze et hard rock, surfant sur leurs 30 ans de carrière musicale. Ils offrent un condensé de ce qu’ils savent faire malgré la setlist réduite, et la foule bien présente a même l’occasion d’écouter en live le prochain single, ‘Shovin’ Rocks’. Des refrains qui scandent le mot ‘Rock’n’Roll’, rien de mieux pour chauffer un début de journée au Greenfield ! De quoi patienter en attendant la sortie de l’album, prévue seulement pour 2019, mais qui annonce du bon. Le titre sonne moins propre et conventionnel que le dernier album, ‘Four by Four’.

Ce dernier album aux sonorités plus pop n’empêche pas les Suédois de rester, sur scène, le groupe de punk sleaze qu’ils ont toujours été.

 

Brian Fallon and the Howling Weather (Sandra Lehmann)

©Maud Robadey

Plus connu comme le frontman des Gaslight Anthems, Brian Fallon s’est lancé depuis quelques années dans une carrière solo, s’entourant de différents musiciens, dont son acolyte préféré des Horrible Crowes, Ian Perkins, à la guitare. D’ailleurs, s’il ne venait pas des Gaslight Anthem, on douterait que Brian Fallon puisse être programmé au Greenfield. Toujours bavard entre les morceaux, l’Américain n’hésite pas à en rire et nous annonce qu’il est ‘content qu’ils soient le groupe le plus bruyant du festival aujourd’hui’ !

Brian et ses titres folk punk mid-tempo nous donne les frissons grâce à des textes remplis d’émotions qui montrent que ses qualités de songwritter ne sont plus à prouver. Si le premier rang est principalement constitué de fans de Volbeat, déjà placés pour le highlight du jour, Fallon réussi le pari de leur tirer quelques hochements de tête et les fait même chanter un peu : avec des ‘oooh’ efficaces à reprendre en chœur et bien placés, on se met facilement un public en poche !

On a droit à une prestation exceptionnelle : si Brian est parfois coutumier de l’oubli de paroles et de justesse approximative en live, il délivre ici une prestation sans faute ! Il montre d’ailleurs toute l’étendue de son potentiel vocal sur le titre ‘Etta James’, tiré de son dernier album en date.

Si le côté folky ‘sing along’ des chansons parlant de cœurs brisés et de longues promenades en vieille mustang est apprécié, une adaptation de setlist aurait été plus judicieuse pour un festival tel que le Greenfield. Certaines balades auraient pu être remplacées par des titres plus énergiques, le répertoire de Fallon n’en manquant pourtant pas ! Il n’hésite cependant pas à faire plaisir aux fans en jouant aussi des titres de ses différents projets, dont les Horrible Crowes.

Entre deux morceaux, il s’émerveille et semble inspiré devant le paysage : ‘Regardez ces montagnes, elles sont énormes, c’est là qu’on voit à quel point on est petit. Je suis sûre que c’est là que se cachent les dragons!’ De l’inspiration pour un futur titre dédié au Greenfield Festival peut-être ?

 

Korpiklaani (Sandra Lehmann)

©Maud Robadey

Changement d’ambiance ! Les trolls et autres créatures des forêts sombres nous envahissent ensuite … enfin, dans nos têtes en tout cas !

Un peu de folk metal venu tout droit de Finlande, voilà ce qu’il nous manquait ! Le groupe est intelligemment placé dans le running order pour réveiller la foule à l’heure de la fin de la sieste.

Venus nous faire danser le pogo-polka dans une ambiance festive et apportant la bonne humeur, leur musique cadre avec le panorama qui s’étale devant eux : des montagnes aux cimes embrumées débordant de légendes diverses (et, selon Brian Fallon, de dragons).

 

Bullet For My Valentine (Pauline Elmer)

©Andy Gaggioli

Avec un nouvel album à paraître, Bullet For My Valentine revient cette année encore au Greenfield. Mais avec une dernière prestation en 2016 et ‘Venom’ sorti en 2015, on ne va pas se mentir, leur dernier concert au Greenfield était sensiblement similaire. Mis à part leurs nouveaux singles, ‘Letting You Go’ et ‘Over It’, plus electro que ce que les Anglais ont l’habitude de jouer, la setlist est sans surprise. ‘Your Betrayal’ excite la foule et ‘You want a battle ? (Here’s a War)’ fait encore monter l’ambiance d’un cran. Pas de doute, Bullet For My Valentine sait faire plaisir aux spectateurs. Les Gallois font un show du tonnerre, Jason Bowld, le nouveau venu se présente au public avec un solo de batterie, et le concert poursuit son rythme endiablé. Bien que Jamie Mathias remplisse son contrat à la basse, la voix de Jason James (basse et voix de 2003 à 2015) manque à une partie des auditeurs. Qu’à cela ne tienne, BFMV sait nous faire retourner en adolescence et rassembler la foule, malgré l’averse. ‘Waking the Demon’ vient clore ce concert fort sympathique.

 

The Offspring (Pauline Elmer)

©Maud Robadey

On parlait de retomber en adolescence ? Je ne vais pas mentir, c’est sans grande conviction que je me rends à la Jungfrau stage sous une pluie battante. Mon dernier concert de Offspring remonte à 2009 et il était ce que l’on peut qualifier de ‘distrayant’, sans plus. Neuf ans plus tard (déjà !), mon univers musical alors basé sur le punk rock californien s’est élargi. Mais entendre les premiers coups de grosse caisse d’Americana’ nous fait immédiatement revenir à nos 13-14 ans. Entendre ces hymnes de toute une génération résonner dans les montagnes fait un bien fou, et pas qu’à moi, visiblement. La foule saute, danse, chante à en perdre le souffle, les pogos redoublent d’énergie … Bref, la Jungfrau stage devient le terrain de jeu de grands enfants.

En parlant de grands enfants, certains ont eu un peu de peine avec les années. Avec une moyenne d’âge tournant autour de la cinquantaine, c’est clair que les membres de The Offrspring n’ont plus 20 ans. Dexter Holland, bien que vif comme un gardon dans la mesure du possible, commence à peiner quelque peu question justesse sur quelques morceaux. C’est ainsi que le sublime ‘Gone Away’ en version acoustique perd de sa superbe subissant quelques fausses notes au niveau de la voix.

Là aussi, The Offrspring ne prend pas de risque et nous présente des tubes, rien que des tubes. Mais au final, quelques ‘Bad Habit’, ‘Gotta Get Away’, ‘Pretty Flag (For a White Guy)’ ou ‘The Kids aren’t Alright’ ont réussi à nous faire oublier la pluie et la chute de la température pour réchauffer nos cœurs. Le concert s’achève en beauté avec ‘Why don’t You Get a Job’ reprise en chœur par l’unanimité du public et ‘Self Esteem’. Même si The Offspring subit le poids des années, le groupe sait se reposer sur des valeurs sûres, et on se sera au moins bien amusés. Et surtout, on a échappé à ‘Cruising California’ !

 

Volbeat (Pauline Elmer)

©Andy Gaggioli

A l’image de The Offspring, les Danois étaient eux aussi présents en 2016. Ils nous avaient alors présentés un show à l’américaine, comprenant pyrotechnique, batterie surélevée, grands écrans inclus dans le décors et tout le toutim. Cette année, ils ont allégé leurs valises et sont de retour avec un concert à taille humaine, sans artifice. Les fans les plus ardus attendent appuyés à la barrière depuis le début de l’après-midi déjà, tandis que d’autres profitent de la fin du concert de The Offspring pour se faufiler dans la foule. Fort heureusement, la pluie s’arrête de tomber pour ce concert de clôture du Greenfield Festival 2018. La foule s’amasse, un rideau cache la scène. Soudain, ‘Born to Raise Hell’ de Motörhead retenti dans les haut-parleurs. Viennent ensuite les premières notes de ‘The Devil’s Bleeding Crown’ et le rideau tombe pour laisser apparaître le combo américano-danois. Assurer le show doit être dans leurs gènes, car les membres de Volbeat donnent tout à chaque concert et leur public le leur rend bien.

Le problème est qu’ils n’ont rien ressorti depuis ‘Seal the Deal and Let’s Boogie’, paru une semaine avant leur passage au Greenfield en 2016 et qu’ils tournent donc depuis deux ans (et cinq concerts en Suisse) avec la même setlist à peu de choses près. ‘Lola Montez’, ‘Sad Man’s Tongue’, ‘For Evigt’ et ‘Black Rose’ font partie de cette dernière. En revanche, voilà deux ans que ‘Hallelujah Goat’ a disparu des radars lors des shows dans notre pays … Des choix discutables, surtout en sachant que le groupe a une fanbase solide, certains allant même jusqu’à les suivre lors de leur tournée. Un peu de changement redonnerait un nouveau souffle au spectacle qui laisse un amer goût de déjà vu.

En revanche, deux aspects dont on ne parle pas assez au sujet de Volbeat, sont la lumière et le son. Le groupe a su s’entourer de génies en la matière, car dans toutes les conditions, la qualité du son et la balance des instruments est au top grâce à l’ingénieur du son Mads Mikkelsen (non, non, pas l’acteur). Et si le spectacle nous en met plein la vue, c’est grâce à Niller Bjerregaard qui travaille avec le groupe depuis dix ans pour fournir un lightshow époustouflant. Comme quoi, les artistes ne sont pas que sur scène.

Volbeat clôture cette édition 2018 du Greenfield avec, comme à son habitude, le titre ‘Still Counting’. Les Danois marquent la fin des festivités pour cette année.

 

Conclusion (Pauline Elmer)

Cette troisième et dernière journée a été une réussite. Malgré la présence d’une grosse averse, nous avons pu profiter du temps changeant en montagne et la pluie s’en est allée aussi rapidement qu’elle est arrivée. Les concerts de cette 14ème édition étaient fantastiques et nous tenons à remercier l’équipe du Greenfield pour leur organisation.

Cependant, il serait chouette que certains gagnent en savoir-vivre d’ici l’année prochaine. S’il vous plaît, les festivaliers, si vous pouviez ramasser vos déchets au camping et retenir vos mains baladeuses (quand c’est non, c’est non. Point barre.) en 2019, ce serait vraiment cool.

 

Nos ‘Ups and Downs’ du jour :

Ce qu’on a aimé : retomber en enfance pendant The Offspring

Ce qu’on a moins aimé : les prévisions douteuses de Météosuisse

Les trucs insolites du jour :
– croiser The Offspring dans un couloir des backstages et mettre quelques secondes à les reconnaître… si le punk rock est une fontaine de jouvence pour l’esprit, il ne l’est pas pour les rides (ou les poignées d’amour)
– dans la loge destinée aux amis et à la famille après l’interview de Rob de Volbeat, ce dernier nous a dit au revoir et est parti, nous laissant sans pass dans les backstages. On s’est retrouvées surveillées par un sécuritas, n’osant plus bouger en attendant que la responsable des interviews vienne nous ramener à la sortie. C’est qu’on rigole pas avec les journalistes perdues dans les backstages des headliners !

 

©Andy Gaggioli – Dog Eat Dog

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