Graveyard
Graveyard

 

Dépassé, le stade de révélation. Maintenant, Graveyard est bien installé sur la scène rock européenne, et le réaffirme avec leur quatrième album. Interview de leur batteur, Axel Sjöberg.


 

Avec ce quatrième album, est-ce qu’une routine s’installe ?
Certainement pas. En tout cas ce n’est pas ainsi que je le ressens. S’il y a quelque chose dont on se ferait une routine, ce serait peut-être d’être bons ! (rires) mais je pense qu’il faut apprendre à entretenir sa faim, son besoin d’évoluer, faute de quoi les gens se détourneraient de notre musique. Cette énergie et cette sensation se répercutent dans nos morceaux, et les gens le sentent. Du moins, je l’espère.

Comment vous intégrez-vous chez Nuclear Blast, un label largement axé metal ?
Lorsque nous avons signé chez eux, ils n’avaient effectivement pas tellement de groupes en dehors du metal, mais depuis ils ont acquis une plus large variété de styles dans leur roster. Je pense qu’ils ont pris une place vacante lorsque de plus petits labels se sont mis à décliner suite à la baisse des ventes de disques. Je suis ravi des gens avec qui nous collaborons, ils sont très dévoués et bien organisés.

Comparé à vos albums précédents, que peut-on attendre de ‘Innocence & Decadence’ ?
Je crois que ceux qui nous connaissent nous reconnaîtront immédiatement, mais ils entendront également que nous avons fait de nouvelles expériences, avons évolué et repoussé nous frontières musicales. Certaines personnes m’ont dit qu’il fallait plusieurs écoutes pour l’appréhender, mais une fois que c’était fait, elles l’adoraient. Du côté de la production, elle est beaucoup plus claire que sur nos autres albums, tout en restant chaleureuse. On peut entendre que ça a été enregistré dans de grands espaces.

Vous avez rappelé Truls Mörck pour occuper le poste de bassiste, comment ça s’est goupillé ?
C’est l’un des membres fondateurs de Graveyard, il jouait de la guitare avant de nous quitter. On savait qu’il était libre au moment où on s’est séparés de Rikard, alors on l’a appelé pour lui demander s’il pouvait nous dépanner à la basse lorsque nous bossions sur nos démos pour le nouvel album. Une chose en entraînant une autre, on lui a demandé si il était intéressé à réintégrer le groupe, et il a été ravi d’accepter. C’est vraiment extra, il a beaucoup apporté au son de cet album, notamment des parties vocales sur une chanson.

Je ne saisis pas parfaitement comment les termes ‘innocence’ et ‘décadence’ peuvent se marier, est-ce que vous pouvez nous éclairer ?
Ah, je pense que ça enlèverait un peu de magie si l’on devait l’expliquer ! La beauté de ce titre, c’est qu’il peut signifier pas mal de choses, il reste ouvert aux interprétations. Ça pourrait être un veau qu’on a laissé sortir de l’étable pour aller manger de l’herbe fraîche pour la première fois de sa vie. Ça pourrait être un gamin lâché dans un magasin de jouets. Tout ce que vous y verrez ! Je crois que les deux concepts s’accordent souvent ensemble.

Comment vous partagez-vous entre votre feeling seventies et la musique actuelle ?
Je dirais qu’on trouve surtout un feeling 2006-2015 sur nos albums ! Le fait que nous jouions du classic rock avec une production assez ‘chaude’ ne fait pas de nous des gars issus des sixties ou des seventies. Supposons qu’on construise de nos jours une maison en briques, est-ce que ça en fait immédiatement une maison ‘rétro’ ? Je préfère que le temps continue à s’écouler. Je ne voudrais pas rester coincé dans les mêmes moments, à la Bill Murray dans ‘Groundhog Day’. D’ailleurs, on ne sonnerait pas pareil sans le death metal, sans la chanteuse suédoise Robyn, sans le hardcore, sans le punk et mille autres styles musicaux qui se sont développés après les seventies. J’apprécie que des musiciens cherchent de nouvelles manières de s’exprimer musicalement. Suuns est un bon exemple, particulièrement sur leur dernier album.

Y a-t-il d’autres groupes modernes qui vous font vibrer ?
Suuns, clairement. Mais on pourrait aussi citer Uran GBG de Gothenburg, Black Breath, Curtis Harding, Amason, Oblivians, pas mal d’artistes et de groupes actuels en fait !

Quelle partie de votre job préférez-vous : le studio ou les tournées ?
Ce qui est super, c’est qu’on peut faire les deux ! Pas besoin de choisir. Dès qu’on se lasse d’un des deux, c’est le moment de passer à l’autre, mais chacun me stimule de la même manière. Le meilleur, c’est de voir un morceau prendre vie, d’être dans la salle de répet’ avec tes amis et de sentir qu’un truc est en train de se produire : ‘Là on tient quelque chose.’ Idem pour le studio ou les discussions sur le mixage. Tu en tires le sentiment que ce sur quoi tu bosses depuis longtemps est perfectionné, et que ça va devenir ce que tu prévoyais en salle de répet’. Le meilleur aspect de la vie de musicien, c’est les montées de créativité, qu’elles surviennent sur scène, en répet’, ou en studio.

Et de l’autre côté, est-ce qu’il y a des aspects de la vie de rockstar qui sont pesants ?
Je ne sais pas si on est des stars du rock, plutôt des ouvriers du rock ! Et oui, il y a des mauvais côtés. Je ne pense qu’il y ait un seul job totalement dépourvu de mauvais côtés. Pour le rock, ça peut être de ne pas voir sa famille chaque fois que tu es en tournée, le manque de sommeil dû aux aléas de la route, vivre entassés les uns sur les autres sans intimité, etc. Il y en a d’autres, mais heureusement il y a aussi plein de bons côtés. Et franchement, en tant qu’homme blanc vivant en Europe, je ne crois pas être dans la bonne position pour me plaindre de mes conditions de travail…

Dans quelle mesure le succès de Graveyard a-t-il transformé vos vies ?
Eh bien, c’est assez bizarre de pouvoir vivre de sa musique. Mais d’une manière plus générale, je crois que nous essayons tous de rester les mêmes, dans le sens où on ne laisse pas ce succès nous monter à la tête. Mêmes amis, même bled, tu vois. On a juste un boulot inhabituel. J’essaie de dépenser le temps qui m’est donné de la manière la plus sage qui soit. Le seul truc dont on peut être certain, c’est qu’on va mourir un jour, alors j’essaie de mettre à profit le temps dont je dispose.

Vous partez en tournée avec Imperial State Electric, vous vous réjouissez ?
Oui, nous avons joué ensemble à de nombreuses reprises. De supers types et d’excellents musiciens. J’adore leur nouvel album. Et pour nous, c’est un grand honneur de partir en tournée avec Nicke Andersson. C’est un monument de la musique suédoise moderne, il a joué dans Nihilist, Entombed, Hellacopters, The Solution, etc. Avec ça, c’est un des types les plus humbles qui soient. Je ne sais plus si c’est nous qui leur avons proposé de nous rejoindre, mais en tout cas nous sommes ravis de partir avec eux.

La Suède possède une des plus vives et des plus éclectiques scènes musicales d’Europe, comment expliquez-vous cette activité ?
C’est une question difficile. Mais à mon avis, ça doit être lié à la curiosité musicale que ses habitants se sont transmise à travers les générations – peut-être est-ce pareil dans les autres pays. Notre neutralité durant la Seconde Guerre Mondiale a également permis à toutes nos infrastructures de redémarrer après la guerre. Ainsi, de nombreux groupes étrangers ont pu venir se produire ici. Peut-être que ça a créé toute une infrastructure musicale ? Une autre explication serait dans la création par les mouvements ouvriers d’un système pour donner accès à une éducation facilement. Ça remonte aux années 1930, je crois. Peu à peu, ce système a été financé par l’État, afin que ces organisations puissent maintenant accorder de petites subventions aux gens désireux d’en apprendre davantage. Que ce soit dans l’art, l’ensemencement des filets de pêche, les hiéroglyphes, la cuisine ou la musique. En tant que petit groupe, tu peux toucher assez de subventions pour ne pas avoir à payer ton local de répet’, tes cordes de guitare ou tes baguettes de batterie. Ça ne représente pas de grosses sommes, mais ça rend service. Nous avons aussi des gens qui t’aident à trouver des locaux de répétition. Mais actuellement, le plus intéressant, c’est que de nouvelles formes d’organisations de ce genre émergent! Ils mettent sur pied des camps d’été, et des cours le reste de l’année destinés aux jeunes filles, dans le but de les introduire au monde de la musique dès leur plus jeune âge. Peut-être que dans dix ans, l’industrie musicale ne sera plus la foire à la saucisse qu’elle est actuellement ? Je l’espère en tout cas !

FICHE CD
Nom de l’album : Innocence & Decadence
Label : Nuclear Blast
Website : www.facebook.com/graveyardofficial

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.