Avant que tu n’ailles vérifier sur le premier ˈouiquiˈ venu, je t’affranchis, lecteur improbable : le ˈbruxismeˈ, c’est grincer des dents, le truc sympa que tu fais quand t’as 8 ans après avoir bu du coca, parce que l’émail fait alors ce bruit saccadé et mat, plus satisfaisant que quand tu bois de l’eau. Pour ce projet né des cendres de Welington Irish Black Warrior (NE), l’allusion est d’une précision remarquable. L’auditeur est plongé dans un univers brumeux, monotone comme la vie peut l’être quand ton esprit échoue à obtenir un petit mouvement de ton corps à part cette pénible masturbation dentaire.

Avec Cochon Double (Prix Nobel 200 du nom de groupe), c’est une courte et pourtant interminable session d’hypnose malaisante, pour des titres hymnes rafistolés en hommage à une existence comateuse et humiliée, où plane l’ombre de Jean-Louis Costes voire Antonin Artaud.

Musicalement, on est dans le minimalisme délibérément monotone et low-fi, qui pourrait rappeler 16 Horsepower par son dénuement comme sa froideur cadavérique. La voix est fragile, comme sourde à elle-même, les instruments en pilote automatique, faisant fleurir une ambiance d’exil intérieur volontaire comme éclot une vilaine moisissure sur les murs d’une chambre d’ado à jamais scellées. Une laideur authentique, qui sent la transpiration séchée, l’ennui qui pollue toute sensation, toute réflexion et toute interaction sociale basique. On souhaite à l’auteur-compositeur-interprète que tout cela ne soit que vieux souvenirs d’une adolescence somme toute ordinaire, et non pas le portrait fidèle d’une vie d’adulte ressemblant plus à une cryogénisation qui n’effacerait pas la perception du temps qui passe.

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Note: 4/5