Blues Pills - Lady In Gold - Artwork
©Blues Pills

Sale temps pour les fans des Blues Pills, de plus en plus nombreux. Leur label Nuclear Blast fait preuve d’une créativité sans limite et teintée de mercantilisme à l’heure où leur très attendue seconde mouture s’apprête à envahir les bacs. Piller les comptes bancaires des collectionneurs de vinyles : et si c’était là l’intention du label ? En effet, le bien nommé Lady In Gold sortira en huit différentes versions : jaune, orange, violet/rose, marbré, or, noir et transparent, sans oublier le ‘picture disc’. Inutile de préciser que le compact sort également en différents coffrets. Nuclear Blast, à l’instar d’Earache Records, se mue en véritable caverne d’Ali Baba. Collectionneurs ou philanthropes, la nuance est fine.


Et si l’on parlait musique ? Qu’en est-il du toujours « très difficile » deuxième album ? Comme si les suivants étaient plus faciles à réaliser. Nous avons prêté l’oreille à ces dix mélopées inédites, non sans avoir auparavant scruté la magnifique fresque ornant la pochette. Réalisée à nouveau par Marijke Koger-Dunham (une artiste hollandaise qui a œuvré pour les Beatles et Cream notamment) il y a un demi-siècle, elle dépeint cette fameuse ‘Dame en or’, légèrement et délicieusement érotisée. Mais ne vous y trompez pas : il s’agit d’un trompe-l’œil. La dame en question n’est autre que… la mort elle-même. Jusqu’ici, on ne savait pas que la mort avait des mamelons, ce qui ne la rend que plus appréhensible.

Le disque débute par la chanson éponyme. Deux accords de piano ? Tout doute quant à un éventuel changement de direction musicale des Pilules du Blues est dissipé quand surgit, de nulle part, la voix enchanteresse d’Elin Larsson. Puissante. Féline. Grave. La belle Scandinave est en grande forme. L’atmosphère est épaissie par quelques nappes de synthés que ne renierait pas Jon Lord, le tempo est plombé, les mots délicieusement macabres : « La voici la Dame habillée d’or / Elle est jeune, elle est vieille / Elle est la gardienne de l’âme / On l’appelle la Mort. » Un condensé d’énergie brute pour ouvrir les hostilités, quelle bonne idée.

‘Little Boy Preacher’ emboîte le pas dans un climat similaire. Les vocalises d’Elin, mixées très en avant, donnent le frisson. Là encore, Purple et Whitesnake sont référencés avec respect. La surprise vient de ces chœurs gospel tout à fait inattendus. Les Suédois s’invitent à Nashville ni vu ni connu. L’évangile selon les Blues Pills est convaincant, la conversion immédiate.

On ralentit la cadence avec ce ‘Burned Out’ syncopé, psychédélique. Petit détour par Stonehenge. Avant d’embrasser l’univers contemplatif de la soul sur ‘I Felt A Change’. Guère étonnant, quand on sait qu’Aretha Franklin fait partie des idoles de jeunesse d’Elin, qui a baigné dans l’univers de la Motown. Une première incursion en terre soul. On y reviendra vite.

Alors qu’on s’attend à un retour en force sur la plage 5 après deux intermèdes cosy, on est pris à contre-pied. ‘Gone so long’ progresse en crescendo, gagne en intensité au fil du solo grésillant de Dorian Sorriaux, virtuose qui pourrait se la jouer solo, mais qui se met corps et âme au service du collectif. Ses interventions sont posées, calculées, toujours justes et très variées. Dieu sait combien de pédales le Français a utilisées pour créer ces innombrables effets kaléidoscopiques.

Roulements de tambour, rythmique syncopée, chœurs angéliques et sections cuivres sur un ‘Bad Talkers’ qui nous emmène tout droit dans une église baptiste au cœur de Harlem. Ce titre qui élève l’âme n’aurait pas dépareillé sur le premier compact de Joss Stone ou sur la B.O.F. de ‘Shaft’. Un sacré bol d’air spirituel ! Hallelujah !

‘You Gotta Try’ semble ralentir le tempo. Que nenni! Le mouvement s’accélère dès l’amorce du refrain qui prend l’auditeur à contre-pied, la pédale wah-wah du Nantais servant d’appât pour nous aspirer dans une séquence psychédélique et gospellisante du meilleur effet, au cœur des seventies. Ebouriffant.

Le combo s’énerve quelque peu sur ‘Won’t Go Back’, le titre le plus vif jusqu’ici de la collection printemps/été des créateurs d’Örebro. Les paroles parlent de rupture, de clash sentimental, et collent parfaitement au climat musical. Des percussions hystériques viennent se mêler aux arpèges rageurs de Dorian, alors que le morceau se termine dans un véritable capharnaüm sonique, la basse hypnotique de Zach Anderson livrant un combat sans merci avec les lourdes frappes d’André Kvarnström. On l’a compris : Elin est fâchée avec son ex et ne reviendra pas vers lui.

_MG_0206
©Maud Robadey / Daily Rock

La basse sort vainqueur et entonne ‘Rejection’. Elin, toujours en colère et à la recherche de quelque chose de « bon et vrai », délivre une prestation vocale de haute volée. Un échantillon de gospel-rock bien soutenu par des ondes d’orgue et une guitare omniprésente, aux mille effets, jouant à cache-cache avec les vocalises plus démoniaques qu’angéliques de Miss Larsson, qui se joue des larsen.

Pas de ballade en guise d’adieu. Il y a un petit quelque chose d’Hawkwind sur le titre qui clôt le disque, ‘Elements And Things’, une ode à Mère-Nature qui se mue peu à peu en un tourbillon psychédélique auquel il est difficile de résister.

Après un premier album séduisant et prometteur, mais enregistré à tâtons, il semble qu’Elin, Dorian, Zach et André aient définitivement trouvé leur identité propre, sans pour autant renier leurs influences. Le mariage de styles qu’ils proposent (rock, blues, heavy, americana, soul et gospel) est plus que convaincant, ce qui fait d’eux les dauphins des Rival Sons en tant qu’ambassadeurs d’un rock riche et coloré, d’obédience vintage. Ce Lady In Gold est un comme un sort sonique jeté à l’auditeur, tant certaines lignes mélodiques sont entêtantes. Même l’amnésique se souviendrait du refrain incantatoire du titre éponyme. Il se dégage de l’ensemble une délicate saveur psychédélique, tout sauf stérile. Le disque est taillé pour la scène et devrait engendrer un set plus costaud. À vérifier le 11 octobre à Yverdon (Amalgame) et le 22 à Pratteln (Z7) avec les barbus de Kadavar pour chauffer (si besoin était) l’audience. Une chose est sûre : Pericle De Mario, sous le charme d’Elin, s’y trouvera au premier rang.

FICHE CD
Lady In Gold
Nuclear Blast
www.bluespills.eu

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.